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Interdiction des sacs en plastique: les villes de la Rive-Sud prendront le temps de réévaluer

le lundi 22 janvier 2018
Modifié à 12 h 17 min le 22 janvier 2018
Par Sarah Laou

slaou@gravitemedia.com

RÉGLEMENTATION. Après la publication de l'étude de Recyc-Québec qui relativise entre autres l'impact des sacs à emplettes sur l'environnement, les municipalités de l'agglomération de Longueuil ayant adopté un règlement interdisant les sacs en plastique – ou en passe de le faire ‒ affirment vouloir garder le cap. Des révisions pourraient toutefois être apportées. Attendu depuis plusieurs mois, ce rapport sur les impacts environnementaux et économiques des sacs d’emplettes alimente les discussions depuis son dévoilement le 12 janvier. Alors que Brossard est l'une des premières villes à avoir banni le sac à emplette de son territoire, que Saint-Lambert les abolira dès le mois d'avril et que Longueuil envisage également de les interdire dans les prochains mois, le contenu du rapport incite les municipalités à plus de prudence. Un sac pas si polluant L'étude démontre entre autres que le sac de plastique mince (17 microns) présente plus d'avantages sur les plans environnemental et économique que les sacs réutilisables, qui ne sont pas biodégradables. «Par sa minceur et sa légèreté, étant conçu pour un usage unique, son cycle de vie nécessite peu de matière et d’énergie», spécifie le document, qui se base sur une analyse du cycle de vie de huit types de sacs du Centre international de référence sur le cycle de vie des produits, procédés et services (CIRAIG). L'inconvénient du sac d'emplettes jetable demeure cependant son caractère non réutilisable et son abandon dans l'environnement. «Sa dégradation très lente est à la source de la persistance du plastique (polyéthylène) dans l’environnement», indique l'étude. Quant au sac en coton, il serait à proscrire «en raison de son impact important sur l’indicateur Santé humaine, nécessitant entre 100 et 2954 utilisations pour que son impact sur les indicateurs environnementaux de cycle de vie soit équivalent à celui du sac en plastique conventionnel». Recyc-Québec conclut donc que la meilleure solution pour l'environnement est de ne pas utiliser de sacs du tout et précise que «si le sac d'emplettes jetable cause moins de pollution dans sa vie, le sac réutilisable, quant à lui, permet d'utiliser moins de sacs». Une réflexion s'engage sur les règlements Contactés par Le Courrier du Sud, les maires de Brossard, Longueuil et Saint-Lambert ont indiqué qu'ils ne reviendraient pas sur la décision de bannir les sacs en plastique de leur territoire. Cependant, des modifications pourraient être apportées aux différents règlements. À Brossard, où les sacs sont interdits depuis 2016, la mairesse Doreen Assaad assure ne pas vouloir reculer, tout en envisageant des améliorations. «On attendait la sortie de ce rapport et l'analyse que l'on en fait est que nous avons pris la bonne décision, déclare la mairesse. Nous allons nous pencher sur le règlement pour voir comment l'améliorer et aussi, faire des campagnes de sensibilisation pour inciter les citoyens à réutiliser leur sac. On veut aussi redemander l'avis de la population avant de changer la réglementation.» Mme Assaad rappelle que la ville dresse un bilan positif de la mesure, à laquelle 96% des commerçants se sont conformés jusqu'à présent. Du côté de Saint-Lambert, le maire Pierre Brodeur explique que l'étude pourrait remettre en question l'application du règlement qui entrera en vigueur le 22 avril, sans pour autant le compromettre. «Il est important de créer de nouvelles habitudes de vie et de promouvoir l'utilisation du sac réutilisable, précise le maire. Nous allons donc aller de l'avant, bien que ce rapport nous oblige à étudier la question et à suivre avec intérêt les recommandations des experts», conclut M. Brodeur, qui n'exclut pas une réévaluation du règlement avant son application. «La Communauté municipale de Montréal a procédé trop rapidement en poussant les municipalités à bannir les sacs jetables, ajoute M. Brodeur. Il aurait fallu attendre l'étude avant d'embarquer là-dedans.» À Longueuil, la publication de l'étude retarde l’adoption du règlement sur le bannissement des sacs de plastique, reportée au mois de février. La mairesse Sylvie Parent a précisé que le comité exécutif souhaitait réviser la proposition de règlement. «Nous avons encore l’intention d’aller de l’avant avec l’adoption du règlement, affirme Mme Parent. Un dossier révisé sera d’ailleurs présenté aux élus le mois prochain.» Viser le changement de mœurs et de mentalités Selon la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM) qui recommande à ses 82 municipalités d'appliquer la mesure d'interdiction des sacs en plastique avant 2018, l'étude de Recyc-Québec ne remet rien en cause, au contraire. «Le rapport confirme que les sacs visés par le bannissement présentent le pire score en ce qui concerne l'abandon dans l'environnement; les sacs réutilisables demeurent la meilleure option, appuie le coordonnateur en environnement de la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM) Michel Allaire. En ce qui concerne la prise de conscience environnementale des citoyens et la réduction de la consommation, cela a un fort impact.» Or, après le dévoilement de l'étude, l'Association canadienne de l'industrie des plastiques (ACIP) avait saisi la balle au bond en exhortant les municipalités à revenir sur leur décision. Une demande qui n'a pas véritablement eu d'écho, rapporte la CMM. «Les villes ayant adopté le règlement gardent le cap, affirme Michel Allaire. On s'est assuré de savoir si elles étaient à l'aise avec leur règlement à la suite de la publication de l'étude et aucune n'a déclaré vouloir reculer. Pour celles qui n'avaient pas encore pris leur décision, elles ont désormais toutes les informations nécessaires.» Pour la CMM et Recyc-Québec, il s'agit avant tout d'agir sur le comportement des Québécois. «Le meilleur sac demeure celui que l'on réutilise, réaffirme le coordinateur environnement de la CMM. C'est le comportement du consommateur que nous voulons changer. Ce n'est pas qu'une question de tonnage de sac.» «Le sac de plastique est un symbole qui met en évidence notre société de surconsommation: une seconde à produire, 20 minutes d'utilisation et 1000 ans pour se décomposer», ajoute le vice-président de la CCM Normand Marinacci. La CMM continue de déployer des mesures en faveur de l'environnement. Des initiatives, comme le Code volontaire de bonnes pratiques sur l’utilisation des sacs d’emplettes adopté par l’industrie, auront permis de réduire de 50% les sacs jetables utilisés au Québec, en plus de favoriser l'utilisation plus répandue des sacs réutilisables¸.