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Boulot (à la maison), enfants (à la maison), dodo (à la maison)

le lundi 23 mars 2020
Modifié à 11 h 15 min le 23 mars 2020
Par Ali Dostie

adostie@gravitemedia.com

Du jour au lendemain, de nombreux parents se sont retrouvés dans la même situation: confinés à la maison, avec les enfants. Adaptation est le mot d’ordre, et tous cherchent à retrouver une certaine normalité dans cet horizon d’inconnu. Entre les parents en congé forcé et ceux qui doivent conjuguer avec le télétravail, la réalité semble bien distincte. Depuis le 13 mars, Julie Latreille a l’impression de vivre des «journées en double». Elle doit partager son temps entre s’occuper de ses deux enfants de 4 et 6 ans, et travailler. Le patron est bien compréhensif, mais néanmoins, le travail – soit sept heures quotidiennes de boulot – doit être accompli. «Avec les enfants, on fait un plan de la journée, une heure à la fois. Quand les deux jouent ensemble, on les laisse aller. Mais il y a des activités suggérées, dirigées. On leur donne des idées. On passe du temps à s’installer, à ramasser», décrit Mme Latreille, qui travaille dans le milieu de la santé. Ses enfants peuvent aussi aller jouer dans la cour de façon sécuritaire, ce qui rassure la Brossardoise. Mais trouver un équilibre est un défi. «Ils ne comprennent pas trop pourquoi maman passe sa journée à l'ordinateur et ne joue pas beaucoup avec eux. J'ai essayé différents scénarios, mais ça finit que je ne suis pas hyper productive, et j'ai l'impression que je n'accomplis rien de bien dans ma journée.» S’il existe une foule de ressources en ligne pour poursuivre l’éducation des enfants, cela est complexe à harmoniser à son horaire. «Je voudrais me transformer en enseignante à la maison, mais ce n’est pas possible.» Cette situation entraîne un grand stress psychologique, tant chez elle que chez ses enfants, qui se demandent pourquoi ils ne vont plus à la garderie, pourquoi ils ne voient plus leurs amis. Elle se doute bien que la fermeture des établissements scolaires et de garde se prolongera au-delà de deux semaines, mais admet qu’elle ne se sent pas prête [NDLR. L'entrevue a été réalisée avant l'annonce des mesures du 22 mars sur la fermeture des écoles jusqu'au 1er mai]. «Ce n’est pas un rythme acceptable, ni pour moi, ni pour les enfants.» Si ça se poursuit, Mme Latreille verra s’il existe un quelconque recours pour qu’elle soit en arrêt de travail. «Les enseignants, les services de garde sont en arrêt forcé et sont payés, Il y a des mesures pour les travailleurs autonomes qui doivent arrêter, mais pour les travailleurs, qu’est-ce qui va arriver?» Se donner du temps de qualité Suppléante dans des écoles de la Commission scolaire Marie-Victorin, Audrey Épars se retrouve en congé forcé avec sa fille de 7 ½ ans Laeticia. Dès la fin de semaine, elle a planifié une routine – «mobile!» – pour la semaine à venir, histoire de garder une structure et un rythme de vie. L’avant-midi, c’est l’école à la maison. Une heure est consacrée à la lecture, puis un temps est réservé aux mathématiques. «Comme elle aime moins les maths, ça dure moins longtemps!» relate Mme Épars. Tout au long de la semaine, elle lui apprend de nouveaux mots, qui se retrouveront dans une dictée à la fin de la semaine. «J’essaie de reprendre ce qu’elle fait à l’école.» La Longueuilloise se réfère beaucoup au site Alloprof, dont les ressources et les exercices sont fort utiles en ces circonstances. «J’essaie aussi le plus possible de lui donner de la culture générale, comme c’est difficile pour des enseignants qui doivent gérer un groupe de 19 élèves.» Une conférence du premier ministre de l’Ontario au bulletin de nouvelles est l’occasion de lui expliquer ce que sont les provinces. «Elle a toujours voulu que je lui enseigne à la maison. Elle voit à quoi ça ressemble et on le fait tout en s’amusant.» Les après-midis sont plus ludiques. Entre autres, elles sortent dehors, sans contact avec les gens autour. Chaque jour, Laeticia discute avec ses amis par appel-vidéo. Audrey et sa fille font aussi la cuisine ensemble, le plus possible. «On va être ouvertes aux petites gaffes. On a le temps.» «Ma fille aime faire semblant qu’elle est une Youtubeuse, alors on fait des vidéos, illustre la maman. Par exemple, elle explique comment faire de la pâte à crêpes. Elle pratique ses exposés oraux. On joint l’utile à l’agréable.» Suppléante depuis peu, Audrey Épars a récemment pris un engagement pour remplacer une enseignante en congé de maladie. Dans sa situation actuelle – et pour bien des enseignants –, difficile de savoir pour le moment si elle touchera une rémunération. Tôt ou tard, le stress financier se fera ressentir.     Le coronavirus expliqué aux enfants Si l’inconnu a de quoi inquiéter les parents, il en est de même pour les enfants. Julie Latreille emploie des mots simples pour expliquer à ses enfants la pandémie et ses répercussions. Elle les a invités à faire un dessin du virus. «Ça permet de mettre une image sur la situation.» De son côté, Audrey Épars juge que les enfants sont très résilients dans des situations difficiles. Elle a expliqué à sa fille l’importance de l’isolement volontaire. Si elles n’ont rien à craindre, il ne faudrait pas qu’elles attrapent le virus pour ensuite le transmettre à grand-papa ou grand-maman. «Elle est assez optimiste, elle me sort des mots d’encouragements, en disant qu’on est ensemble.»