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Longueuil nomme son inspectrice générale du BIC

le mardi 16 octobre 2018
Modifié à 19 h 57 min le 16 octobre 2018
Par Ali Dostie

adostie@gravitemedia.com

Marie-Ève Lemieux quitte le Bureau du vérificateur général de la Ville de Montréal pour devenir l’inspectrice générale du Bureau d’inspection contractuelle (BIC) de Longueuil. Sa nomination a été adoptée à la séance du conseil municipal du 16 octobre. Le BIC, annoncé en août 2017 et créé en juillet dernier, veillera à assurer l’intégrité et la conformité de la gestion contractuelle au sein de l’agglomération, en prévenant les manquements à l’intégrité et aux règles applicables. Montréal, Laval et Saint-Jérôme comptent déjà de telles structures. Cette instance surveillera l’ensemble des étapes du processus contractuel et pourra émettre des recommandations, en amont. L’inspectrice générale Marie-Ève Lemieux dirigera le BIC, planifiera l’ensemble de ses activités et ressources. Ce nouveau mandat, qui débutera le 19 novembre, est en droite ligne avec son expertise professionnelle dans la détection et prévention de la fraude. Comme «chef de mission - vérification - juricomptabilité» au bureau du vérificateur général de la Ville de Montréal depuis 2010, Mme Lemieux a notamment supervisé le traitement des signalements reçus au sujet d’allégation de conflits d’intérêts, de fraude, de collusion et de corruption dans l’octrois de contrats publics et des transactions immobilières. Une expérience qui lui a fourni «une connaissance pointue du processus de gestion contractuelle, indique Mme Lemieux, en entrevue au Courrier du Sud. Ce sont souvent des dossiers comme ça qui étaient soumis; des contrats d’infrastructures, de services professionnels, de contributions à un organisme. Ça peut être très varié.» En tant que vérificatrice chez la firme comptable Lemieux Nolet, Mme Lemieux a fait partie de l’équipe d’experts retenus par la Commission Gomery, durant laquelle elle a analysé les stratagèmes de surfacturation et d’autres éléments de surfinancement politique. C'est au cours de ce mandat qu’elle a « eu la piqûre pour le domaine. J’ai vu la contribution de la juricomptabilité dans ce type d’enquête. J’ai vu aussi l’influence que ç’a pu avoir sur la suite des choses», partage celle qui fait partie des premières cohortes de juricomptabilité de l’Université de Toronto. Priorité: système de signalement La première action qu’entend poser Mme Lemieux au BIC est de mettre en place un système de signalements, une plateforme sécurisée permettant possiblement appels et signalements sur Internet sur laquelle tant les fonctionnaires et fournisseurs pourraient s’adresser de façon anonyme. «Les gens doivent avoir confiance dans le processus», insiste-t-elle. Collusion et corruption demeurent des problèmes bien présents pour les instances municipales. Il y a de plus en plus de sociétés écrans et de nouveaux joueurs et noms de compagnies sont apparus. «Par contre, il y a maintenant une communauté d’inspecteurs généraux. Il y aura un partage d’informations.» Établir la confiance des entrepreneurs, fournisseurs et citoyens est un grand enjeu, auquel pourra contribuer le BIC en assurant une transparence et une équité, croit Marie-Ève Lemieux. Indépendance «essentielle» Contrairement à Montréal où le Bureau d’inspecteur général est indépendant, l’inspectrice générale relèvera du Service de police de l’agglomération de Longueuil. Une situation qui avait suscité des questionnements de la mairesse de Brossard Doreen Assaad quant à l’indépendance du BIC. Mme Lemieux est confortable avec cette situation et elle est d’avis que cette distance est «essentielle». Elle est aussi convaincue qu’elle aura suffisamment les «coudées franches», rappelant que l’inspecteur général de Laval et Saint-Jérôme relève aussi du service de police. Contexte politique L’octroi de contrats et le processus d’appels d’offres ont fait l’objet de vives tensions entre la mairesse Sylvie Parent et l’opposition. Rappelons que Mme Parent avait demandé l’intervention de l’Unité permanence anti-corruption (UPAC) lorsque l’opposition avait, en avril, forcé le retour en appels d’offres pour deux contrats d’entretien de terrains sportifs. Est-ce que le contexte politique pour le moins tendu depuis les élections de novembre pourrait nuire au travail du BIC? «J’ai déjà vécu des situations tout aussi particulières, avance Mme Lemieux, précisant qu’elle base ses analyses sur des faits. De par mon cheminement professionnel, j’ai toujours abordé les choses de façon très impartiale et objective.» Elle voit aussi d’un bon œil que la création du BIC soit née d’une volonté politique, et qu’elle ne soit pas le résultat d’une recommandation externe. AMP vs BIC La Loi 108 favorisant la surveillance des contrats des organismes publics et instituant l’Autorité des marchés publics, récemment adoptée, se penche entre autres sur la conformité du processus d’adjudication de contrats des organismes publics. Si une part de son mandat est similaire à celui du BIC, il demeure très large et à ce titre, ne risque pas de dédoubler le travail du bureau de Longueuil, estime Marie-Ève Lemieux. «Je ne crois pas que l’AMP va se pencher sur Longueuil pour les prochaines années. Et c’est bien d’avoir un outil dissuasif, à l’interne. De posséder les connaissances», souligne-t-elle. «Excellente nouvelle» La mairesse Sylvie Parent a souligné cette nomination qui marque le début des travaux du BIC et qui s'avère «un ajout important aux moyens déjà en place pour veiller à la saine gestion de l’octroi de contrats entre la Ville et ses fournisseurs. C’est une excellente nouvelle pour la démocratie municipale et la lutte à la corruption et la collusion qui nous permet de poursuivre vers les plus hauts standards d’éthique.» Le conseiller municipal de l'opposition Michel Lanctôt a aussi souhaité la bienvenue à Mme Lemieux, rappelant que son arrivée était fort attendue. Il a affirmé espérer que ses recommandations soient suivies et que les rapports qu'elle sera appelée à produire seront publics.