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L’opposition devrait réduire le budget de son cabinet, croit Sylvie Parent

le mercredi 13 novembre 2019
Modifié à 10 h 46 min le 14 novembre 2019
Par Ali Dostie

adostie@gravitemedia.com

La mairesse de Longueuil Sylvie Parent a annoncé qu’elle retournera 80 000$ de la masse salariale de son cabinet dans les coffres de la Ville. Un avis de proposition du conseiller Éric Beaulieu demande de plus une réduction de 100 000$ du budget du cabinet de l’opposition. «Je retourne 80 000$ alors que ma charge de travail, celle des membres du comité exécutif et des employés qui nous appuient ne cesse d’augmenter», a-t-elle soutenu, en début de séance du conseil municipal du 12 novembre. La mairesse a rappelé qu'à l'automne 2018, l'opposition officielle avait réclamé une augmentation de la masse salariale de son cabinet, ce qu'elle a accordé. Avec une hausse de 75 000$, le budget du cabinet de l’opposition se chiffre à 315 000$. Cette augmentation a eu pour effet d'augmenter de 150 000$ le budget du cabinet de la mairesse, qui a atteint 630 000$. «Je leur avais dit à ce moment que nous n’aurions pas besoin de tout cet argent», précise-t-elle en entrevue, justifiant pourquoi elle est en mesure de retrouver ces sommes aujourd’hui. Malgré le départ en juin de cinq élus qui siègent maintenant comme indépendants, le budget pour le cabinet de l'opposition est demeuré inchangé, a-t-elle relevé. Mme Parent a insisté sur le rôle politique, voire «partisan», du cabinet de l'opposition. «Est-ce que l’opposition officielle retournera une partie de son budget à la Ville maintenant qu’ils ne sont plus que trois conseillers?», a-t-elle demandé. «Depuis janvier, ils auraient pu poser un geste», poursuit-elle en entrevue. Une «diversion» Le chef de l’opposition Xavier Léger a répondu qu’il avait déjà prévu remettre 35 000$, une somme non-utilisée du budget de son cabinet. Le lendemain, il a confirmé que l’opposition retournera un peu plus de 40 000$. M. Léger voit cette annonce de Mme Parent comme une «diversion» pour «détourner le vrai débat qui est le salaire de la mairesse». Il qualifie aussi ce geste de «manœuvre médiatique», alors que des surplus peuvent être retournés chaque année à la municipalité. L’an dernier, il n'y avait toutefois eu aucun surplus. L’an dernier au cabinet de la mairesse, avec un budget de 480 000$, des sommes avaient également été retournées, mais pas «aussi substantielles que cette année», a nuancé Mme Parent. À l'encontre de la Loi? L’avis de proposition déposé par le conseiller Éric Beaulieu à la fin de la séance demande de réduire de 100 000$ le budget du cabinet de l’opposition. Le conseiller a suggéré que cette somme soit remise aux élus indépendants, qui n’ont actuellement aucun budget consacré à du personnel politique. L’avis de proposition souligne que le poids de l’opposition a diminué de 63% avec le passage d’élus à titre d’indépendants, alors que la réduction de 100 000$ du budget se traduirait par une diminution de 32%. Selon le chef de l’opposition, ce que propose M. Beaulieu va carrément à l’encontre de la Loi sur les cités et villes et relève de «l’improvisation». La Loi stipule que le montant alloué aux budgets de cabinets est réparti aux deux tiers pour le cabinet du maire, et un tiers pour celui du conseiller désigné chef de l’opposition. Une règle qui s’applique peu importe le nombre d’élus au sein de l’opposition, tant que l’ensemble des candidats du parti aient obtenu, lors de l’élection générale, au moins 20% de tous les votes valides. La Loi sur les cités et villes ne prévoit pas de sommes à la disposition d’élus indépendants pour l’embauche de personnel politique. Ainsi, réduire de 100 000$ le budget de son cabinet n’est pas une option pour M. Léger. Lorsque cinq conseillers de l’opposition sont devenus indépendants, une ressource administrative du cabinet leur a été transférée. Le cabinet de l’opposition compte toujours quatre membres de personnel politique. M. Léger rappelle que les indépendants, comme tout conseiller, ont droit à des sommes de recherche et de soutien, soit environ 25 000$ chacun. Selon Sylvie Parent, la proposition sur la table permettrait de réfléchir à la répartition des sommes réservées pour des ressources politiques. «Nous ne sommes pas la seule Ville où de plus en plus d’élus deviennent indépendants. N’est-ce pas une réflexion que l’on devrait avoir? Actuellement, 3 élus sur 16 ont 50% du budget de la mairesse. Est-ce normal? Est-ce logique, alors que les indépendants n’ont aucun soutien politique?» Elle s’est aussi dite «surprise» que les élus de l’opposition se réfèrent à la Loi, accusant ceux-ci de vouloir en faire fi pour plafonner sa propre rémunération. Un salaire controversé Durant la séance, le conseiller Benoît L’Écuyer est revenu à la charge, alors que le conseil devait se prononcer sur sa proposition visant à instaurer un règlement plafonnant le salaire de la mairesse. La rémunération globale de Sylvie Parent se chiffre à plus de 240 000$. M. L’Écuyer aurait espéré que ses collègues se joignent à lui afin que le salaire de Mme Parent revienne au niveau de 2017, soit environ 150 000$, plus les indexations d’usage. L’implantation d’un tel règlement aurait également pour effet de fixer le salaire maximal d’un conseiller à 90% de celui de la mairesse. Selon M. L’Écuyer, la conseillère Monique Bastien, en occupant le poste de vice-présidente du comité exécutif, touche une rémunération de 168 000$, ce qui est plus élevé que l’ancienne mairesse Caroline St-Hilaire. Tant la mairesse que les conseillers Nathalie Boisclair et Steve Gagnon ont réitéré qu’ils jugent préférable d’attendre le rapport de l’École nationale d’administration publique (ÉNAP) sur la rémunération de l’ensemble des élus. En début de séance, Sylvie Parent a d’ailleurs laissé entendre qu’à l’issue de cette démarche, dont les résultats devraient être dévoilés au début de 2020, «il y aura des ajustements, tant au salaire de la mairesse qu'à celui de tous les membres du conseil, peu importe leur fonction». Cette démarche sera à ses yeux «l’opportunité pour faire un bon ménage», alors que pourrait être étudiée entre autres la question de la rémunération des membres de commissions. La mairesse a indiqué au journal que des rencontres devraient avoir bientôt lieu entre le professeur de l’ÉNAP et les élus. Le chef de l’opposition voit dans ces propositions de Mme Parent et M. Beaulieu un moyen de «gagner du temps». «On nous avait promis le rapport pour l’automne, puis pour décembre, et là, c’est pour janvier. Et ça devra passer d’abord par le comité exécutif. Si ça ne fait pas leur affaire, qu’est-ce qui qui va arriver?»