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Pierre Nantel fera d’un consensus autour de l’enjeu environnemental son cheval de bataille

le jeudi 20 décembre 2018
Modifié à 11 h 50 min le 19 septembre 2019
Par Ali Dostie

adostie@gravitemedia.com

POLITIQUE. Le député néodémocrate Pierre Nantel a rallié son chef Jagmeet Singh, la chef du Parti vert du Canada Elisabeth May et le chef par intérim du Bloc Québécois Mario Beaulieu afin de réclamer auprès du gouvernement et des conservateurs que la lutte aux changements climatiques ne soit pas un enjeu partisan. Il faut tirer des leçons de la crise des gilets jaunes en France, estime le député de Longueuil – Saint-Hubert. Les citoyens se sont rendus dans la rue en raison d’un ras-le-bol de «se faire mettre le bill sur la tête». Pour qu’il y ait acceptabilité sociale dans la lutte aux changements climatiques, les efforts doivent venir de tout le monde. «Les citoyens ne veulent pas avoir l’impression d’être les dindons de la farce et être les seuls à faire les efforts.» M. Nantel a lancé une invitation afin que se tienne un sommet réunissant tous les chefs de partis. Jusqu’à maintenant, ni Justin Trudeau ni Andrew Scheer n’ont répondu à l’appel. Le député fera de la tenue de ce sommet son principal cheval de bataille en janvier, se faisant ainsi le «porte-voix d’un paquet de gens pour qui l’environnement est la priorité numéro 1.» «Mon objectif, c’est de convaincre Trudeau et Scheer de participer à un sommet où l’on dit que le réchauffement climatique, c’est un problème, qu’on s’est engagé [à la COP21] et qu’il faut un moyen d’atteindre nos objectifs de réduction.» «Si les engagements qu’on a pris à la COP21 ne valent rien, poursuit-il, disons le tout de suite et renonçons à toute forme de dignité! Reconnaissons qu’il faut le faire; ensuite, on s’obstinera comment.» À ses yeux, l’environnement ne devrait donc pas être l’enjeu majeur de la prochaine campagne électorale, mais bien avoir déjà fait consensus. Si l’environnement ne figure pas en tête de liste des priorités du programme conservateur, M. Nantel dit discuter avec des députés conservateurs qui reconnaissent l’urgence d’agir. Car urgence il y a. «Le réchauffement climatique, ce n’est pas à gauche, ni à droite; c’est dans notre face», dit-il, paraphrasant Émile Proulx-Cloutier, qui avait tenu ces propos en entrevue à Tout le monde en parle. Le député espère d’ailleurs que la réponse de M. Scheer vienne avant celle du premier ministre. «Si c’est Trudeau qui répond en premier, ce sera trop facile de dépeindre les conservateurs comme des dinosaures qui ne veulent rien savoir!» Ministre de la guerre Après un tel sommet, Pierre Nantel propose que le gouvernement concocte un projet de loi qui mettrait sur pied un cabinet et un ministre de la guerre au réchauffement climatique. Chaque parti pourrait y déléguer un représentant, suggère-t-il. Celui à la tête de ce ministère pourrait être choisi par l’ensemble des partis, au moyen d’un vote secret, parmi une liste de noms suggérés par le gouvernement. Cette personne, qui ne serait pas un élu, pourrait siéger pour un mandat plus long que quatre ans, afin de ne pas être «sujette aux tempêtes électorales». Une telle instance viserait à trouver des «solutions mitoyennes» pour parvenir à atteindre les cibles de réduction de gaz à effet de serre, plus difficiles à trouver dans la dichotomie gauche/droite actuelle, où «tu défends soit le statu quo, soit le granolisme absolu», image Pierre Nantel. Un tel ministère veillerait à ce que la lutte aux changements climatiques soit prise en compte dans l’ensemble des sphères d’activités. «Imagine GM qui ferme et se fait dire par le gouvernement que la priorité, c’est la technologie du futur, que les automobiles soient plus propres.  Si tu veux rééquiper l’usine pour faire de nouveaux modèles, avec du graphite et du lithium du Québec, on va t’aider deux fois plus», donne-t-il en exemple. «C’est un message tellement fort à envoyer à tout le monde, tant aux pollueurs, aux citoyens, aux fonctionnaires qu’au capital privé. "Ils ont l’air crinqués, si on veut faire business là, on doit fitter avec les ambitions de ce pays"». Le député s’est réjoui que le conseil municipal de Longueuil ait adopté une motion sur l’urgence d’agir dans la lutte aux changements climatiques, comme l’ont fait plus de 50 autres municipalités, demandant un appui des gouvernements provincial et fédéral. Sa proposition est une réponse claire à la demande des villes, estime-t-il. «C’est une volonté parlementaire, ça, c’est fort, et les villes le demandent. Pour elles, c’est un enjeu concret.» Plus de cohérence L’annonce du gouvernement libéral de verser 1,6 G$ afin de soutenir l’industrie pétrolière et gazière en Alberta, à quelques jours de la sortie de la COP24 en Pologne, s’avère une profonde incohérence, estime Pierre Nantel. «On est rendu à 6 milliards de fonds publics. La planète n’en a rien à foutre, des jobs des Albertains. Ils se disent juste "Ben voyons, tu dis que tu vas être transparent, et tu annonces ça! " C’est une hérésie totale! C’est une question de cohérence!» Cette somme servira à appuyer les entreprises à rejoindre de nouveaux clients et à investir dans de nouvelles technologies. La première ministre albertaine Rachel Notley réclamait de l’aide du fédéral pour l’achat de nouveaux wagons pour l’exportation de pétrole brut. Le député reconnait la dichotomie entre l’enjeu environnemental et le droit des travailleurs, et le réengagement de la province à soutenir ces travailleurs. «Si on était tous ensemble, parce que le Canada a convenu que le pays doit atteindre ses objectifs, on pourrait mettre beaucoup d’argent pour convertir ces emplois dans un autre secteur.» Suffit, le Québec bashing! En entrevue, Pierre Nantel est revenu sur les propos du premier ministre François Legault, qui a qualifié d’«énergie sale» le pétrole de l’Alberta. Ces propos ont ravivé les tensions entre les provinces. «Ce n’est pas idéal de dire à tout le monde ses quatre vérités dans des négociations, mais c’est la vérité!» Pierre Nantel avance que le Québec est l’un des meilleurs joueurs pancanadiens en matière d’environnement, notamment grâce à l’hydroélectricité. Il évoque entre autres la Paix des braves qui a permis à Hydro-Québec de construire le projet hydroélectrique Eastmain-Rupert. «Si le Canada devait payer pour ses abus de pollution, tout d’un coup, le bilan serait positif pour le Québec. La péréquation, c’est des peanuts comparée aux crédits carbone que le Canada n’achète pas grâce à nous.» Le député ne mâche pas ses mots. «Ça va faire, le Québec bashing