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Économie
Quand le consommateur paie plus mais que le producteur n’en bénéficie pas
le dimanche 06 décembre 2020
Modifié à 16 h 55 min le 04 décembre 2020
Un texte de Martin Ménard – Collaboration spéciale de La Terre de chez nous
Le prix de certains aliments ont grimpé de façon marquée pour les consommateurs ces dernières années. Est-ce que les producteurs qui sont à la base de ces produits ont profité de ces augmentations? Des données de Statistiques Canada démontrent qu’en général, la réponse est non.
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Entre 2014 et 2019, le prix de l’alimentation, incluant les ventes au détail et en restaurant au Québec, a augmenté de 11% pour les consommateurs, tandis que le prix moyen payé aux producteurs est demeuré sensiblement le même avec 1,1% d’augmentation, révèle Statistique Canada.
Seulement dans le secteur bovin, le consommateur a payé 27% plus cher pour la moyenne des coupes de bœuf, passant de 15$/kg en 2014 à 19$/kg en 2019, indiquent cette fois les chiffres des Producteurs de bovins du Québec (PBQ). Or, pendant ce temps, les éleveurs de bœufs québécois ont vécu l’inverse, recevant 9% de moins pour leur production. Le prix serait en effet passé de 5,85$ à 5,35$ le kilo/carcasse entre 2014 et 2019.
L’éleveur Jean-Thomas Maltais, du Lac-Saint-Jean, affirme que ces chiffres sèment la grogne.
«Les producteurs ne sont pas contents. Ils se questionnent beaucoup sur les marges qui se font au-dessus d’eux. La différence est trop importante entre ce qu’ils reçoivent et ce que paie le consommateur», indique celui qui est également président des PBQ.
Jordan LeBel, professeur en marketing alimentaire à l’Université Concordia de Montréal, spécifie qu’aucune étude ne précise malheureusement la répartition du dollar alimentaire. Il se réfère cependant à un ouvrage américain concluant que seulement 14% du prix payé par le consommateur va à l’agriculteur.
«Le reste, ça va aux détaillants, aux campagnes de marketing, aux transformateurs, aux transporteurs, etc. Dans la restauration, c’est encore pire, 4% reviennent au fermier selon les chiffres américains, et au Québec, je crois que ces pourcentages sont encore plus bas», rapporte-t-il.
À l'Union des producteurs agricoles, le coordonnateur à l'économie et au commerce David Tougas soutient qu'avec les dépenses qui augmentent pour les fermes et les prix qui stagnent, la profitabilité décroît. Dans un monde idéal, il faudrait que le marché rémunère l'agriculteur équitablement, mentionne-t-il.
«Mais en ce moment, le résultat, c'est que le revenu net des fermes baisse», se désole M. Tougas.
Devant l’importance de la situation, et surtout, suite à la décision de Walmart de vouloir prélever un pourcentage additionnel à ses fournisseurs, la députée Dominique Anglade propose un code de conduite afin de diminuer l’iniquité entre les producteurs agroalimentaires et les grandes chaînes commerciales d'alimentation.