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Quand le sport transcende le jeu

le jeudi 25 février 2016
Modifié à 0 h 00 min le 25 février 2016

DÉCROCHAGE. Une solution miracle pour garder les jeunes dans les salles de classe et loin de la rue, particulièrement dans les milieux défavorisés, pourrait bien se trouver à même les établissements scolaires, dans le gymnase.

Plusieurs moyens de prévenir le décrochage scolaire ont été explorés au fil des années, les intervenants étant toujours à la recherche d'une solution miracle. Ce faisant, le sport pourrait bien s'avérer être ce remède tant recherché pour pallier le décrochage et améliorer le rendement des élèves.

Selon plusieurs études, la pratique d'un sport dans un cadre scolaire est associée à un meilleur rendement académique, à des ambitions scolaires plus élevées et à une probabilité de décrochage plus faible.

C'est dans cette optique que les «couleurs-écoles» ont fait leur apparition en 2011-2012 dans les établissements de la Commission scolaire Marie-Victorin (CSMV), faisant passer le taux de rétention des élèves de 65 à 75% en à peine quatre ans.

«La beauté du sport, c'est que l'élève se responsabilise par rapport à son éducation, explique l'intervenant à l'école secondaire Gérard-Filion et criminologue de formation Carol Beaupré. Il ne se rend même plus compte qu'il a une certaine obligation d'aller à l'école parce que c’est lui qui décide de s'engager dans un programme sportif.»

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Le sport permet aussi à ces jeunes d'acquérir de la reconnaissance, un facteur essentiel à l'épanouissement d'un jeune, selon M. Beaupré.

Le danger de la rue

La direction de l'école Gérard-Filion est bien au fait de la réalité de sa clientèle. Comme milieux défavorisés et criminalité se côtoient fréquemment, les intervenants se doivent d'être constamment à l'affût.

«On ne se le cache pas: on a des jeunes qui côtoient des gangs émergents, avoue la directrice Sylvie Dupuis. Sans parler de véritable gang de rue, ce sont des groupes qui se criminalisent. C'est sûr qu'en milieu défavorisé, les jeunes sont plus vulnérables, autant nos filles que nos gars.»

«Dans une école secondaire, il y a du jeune au pied carré, poursuit-elle. C'est une pépinière pour ceux qui vendent de la drogue et qui recrutent pour des réseaux de prostitution. C'est un sujet qui est très tabou pour plusieurs parce que ça joue dans nos valeurs.»

Selon la directrice, le sport permet de détecter plus facilement et plus rapidement lorsqu'un élève se rapproche d'un tel milieu. Que ce soit par une pratique manquée ou par un effort moindre qu'à l'habitude, les intervenants sont plus au fait de l'évolution de leurs élèves.

«La drogue, il y en a partout, les tentations, il y en a partout. Ils vont tester leurs limites, c'est normal. Nous, on est là pour les guider pour qu'ils fassent des choix éclairés, indique-t-elle. Quand on est plus au fait de ce qu'ils vivent, ça nous permet d'intervenir plus rapidement, ce qui est beaucoup mieux que d'attendre. Il faut voir les signes avant-coureurs.»

Récupérable

Au-delà des statistiques de taux de rétention, la réussite de cette approche axée sur le sport a des répercussions inespérées dans la vie des jeunes.

«Quand je suis arrivée à Gérard-Filion, je vivais des moments difficiles puisque ma mère et mon frère venaient de décéder. La concentration en basketball m'a vraiment aidée à passer au travers. Si ce n'était pas du sport, je ne me serais jamais rendue en 5e secondaire», estime Catherine Lallemant-Capocci, une élève qui poursuivra ses études en technique policière.

Même son de cloche chez sa coéquipière Alexandra Roy-Cadieux. «C'est surtout sur le plan scolaire que ça m'a aidée, dit-elle. Il y a des moments plus difficiles où tu veux juste abandonner parce que tu es tannée, mais il y a le basket, alors tu continues.»

C'est d'ailleurs ce qui motive le personnel de l'école et sa directrice: l'espoir de voir des jeunes se sortir d'un milieu difficile pour parvenir à s'épanouir.

«Un jeune n'est jamais perdu. Tant qu'une personne est vivante, elle est récupérable», est persuadée Sylvie Dupuis.