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Refonte règlementaire en prévention incendie: impacts importants pour des propriétaires de condos et logements

le mercredi 16 mai 2018
Modifié à 7 h 09 min le 16 mai 2018
Par Ali Dostie

adostie@gravitemedia.com

SÉCURITÉ. La refonte du règlement sur la prévention incendie appliquée depuis juin 2017 impose d’importantes – et parfois coûteuses – modifications aux propriétaires de bâtiments de plusieurs logements. Malgré les importants travaux que cela entraîne, le Service de sécurité incendie de l’agglomération de Longueuil (SSIAL) est d’avis que le jeu en vaut la chandelle, pour sauver des vies. La refonte règlementaire est basée sur des analyses effectuées pour déterminer la cause d’incendies survenus sur le territoire et ayant entraîné des décès ou des blessures. Dans certains cas, les résidents ont mis trop de temps pour contacter les services d’urgence. L’un des importants changements est la nouvelle norme concernant l’installation d’un système d’alarme, qui demeure obligatoire lors que cinq logements ou plus ont une sortie vers une issue commune. Dorénavant, les bâtiments de 13 logements et plus, ou de plus de 3 étages (le sous-sol comptant comme un étage), devront être dotés d’un système relié à une centrale. Avant, cette restriction s’appliquait aux bâtiments de 24 logements et plus. «Tout le monde pense que dès que l’alarme sonne, les pompiers s’en viennent. Mais ce n’est pas toujours le cas. Il y a eu des incendies avec décès dans des bâtiments de plus de 12 logements, alors on s’est dit qu’on devrait ramener cette mesure», expose le chef de division du Service de sécurité incendie Jean-Guy Ranger. Aussi, les anciens systèmes d’alarme nommés VOA présentaient certains défauts. «Si une <@Ri>switch<@$p> de la salle électrique était fermée, le système ne fonctionnait pas et personne n’était au courant», relate M. Ranger. Des systèmes d’alarme plus anciens ne comptent également qu’une seule zone, ce qui signifie que les pompiers ne peuvent savoir immédiatement d’où provient un feu dans un bâtiment de plusieurs étages. «On ne peut pas aller porter secours rapidement à un endroit; on est obligé d’ouvrir toutes les portes pour trouver où est le feu.» Stations manuelles En plus de l’installation du système d’alarme vient l’ajout de composantes telles que détecteurs de fumée, détecteurs de chaleur et stations manuelles. De plus, le niveau d’audibilité du système d’alarme, de l’autre côté d’une porte fermée, doit atteindre 75 dB. Dès qu’il y a un système d’alarme, le bâtiment doit être muni de stations manuelles, ces «commutateurs» qui permettent de l’activer. Ajouter cette restriction dans le règlement visait à mettre fin au «cha cha» qui prévalait d’un Code de sécurité du Québec à l’autre, dans lesquels cette mesure n’était pas toujours obligatoire. Le règlement s’inspire ainsi du Code de 2010. «On retrouve toutes sortes de construction, alors ça demande de l’imagination, admet Jean-Guy Ranger. Dans certains cas, tu peux sortir par en avant, dans une cage commune, mais aussi directement de ton appartement, par derrière. S’il y a un feu dans un condo et que la personne sort directement dehors, sans station manuelle, elle ne peut pas aviser les gens dans le reste de l’immeuble. On veut standardiser.» Même si ça peut sembler inusité, des stations manuelles peuvent aussi être installées à l’extérieur. M. Ranger fait valoir que cela se voit déjà dans certains lieux publics comme le Quartier DIX30. «Le choix revient à l’installateur et au propriétaire. Si j’avais un bâtiment à six portes qui donnent dehors, je ferais installer une station où tout le monde passe à l’extérieur.»
«Ce n’est pas pour le fun qu’on fait ça, c’est pour sauver des vies, sauver des bâtiments.» Jean-Guy Ranger  
Délais accordés aux propriétaires: l’aspect financier ne pèse pas dans la balance À la séance du conseil municipal d’avril, des propriétaires de condos ont réclamé un délai de cinq ans pour réaliser ces travaux qui, dans certains cas, s’avèrent très coûteux. Administrateur de 18 condos, Alain Belzile avait évoqué des dépenses d’environ 15 000$ afin de compléter la mise aux normes. «Avec les réparations et la peinture qui s’en suit, ça frôle le 20 000$... Augmenter à ce point les frais de condos, c’est carrément impossible.» Jean Laperrière, copropriétaire, a pour sa part fait état de «communications déficientes» et d’un manque d’homogénéité dans les demandes de la Ville. «On ne conteste pas la mise à niveau des systèmes, mais on a besoin de temps. À cause de l’argent en jeu, on doit regarder la capacité de payer des résidents. Un syndicat de copropriétés ne peut pas faire d’emprunt dans une banque», a-t-il évoqué. Dans les faits, Longueuil a accordé un délai maximum de 18 mois… dans certains cas. Une situation avantageuse car, selon Jean-Guy Ranger, Montréal n’accorde aucun délai pour ce type de mise aux normes, alors qu’à Laval, le délai est de 12 mois. Les délais sont accordés en fonction des caractéristiques de l’immeuble. Si un bâtiment compte déjà un système d’alarme, il sera considéré moins urgent, par exemple, d’ajouter une composante manquante. Plus il y a de risque d’incendie, plus la ville sera frileuse à accorder des délais. «L’élément financier n’a aucun effet pour les délais, insiste Jean-Guy Ranger. C’est une question de responsabilité légale. Si on dit "prenez tout le temps que vous voulez", qu’un incendie survient et qu’il est démontré que si le système avait été relié à une centrale, on aurait peut-être sauvé des vies… La Ville ne peut pas s’engager pour des responsabilités qui appartiennent aux propriétaires et gestionnaires.» Il est d’avis que la situation est différente dans le cas des délais accordés par le gouvernement pour l’installation de gicleurs dans les résidences pour aînés, alors que les dépenses sont de l’ordre de 200 000 à 500 000$. M. Ranger admet que les normes de Longueuil sont plus exigeantes que la moyenne au Québec. Une pratique qui porte toutefois fruit. Depuis 2003, lorsque l’installation de systèmes d’alarme a débuté, le nombre de décès dans des incendies a diminué de moitié sur le territoire. Suivi inspecteur-citoyen Quant aux critiques exprimées par les propriétaires à l’égard des lacunes dans les communications avec la Ville, M. Ranger rappelle qu’une consultation publique a été annoncée avant l’application du règlement et que des rencontres, tant individuelles que de groupes, ont eu lieu depuis. À la suite d’une visite, un inspecteur est en charge du dossier et peut guider le propriétaire. Il faudra cinq ans, depuis l’entrée en vigueur du règlement en juillet 2017, pour la vingtaine d’inspecteurs de la Ville pour effectuer toues les inspections sur l’ensemble du territoire, par secteur. M. Ranger suggère également aux copropriétaires et gestionnaires de faire affaire avec des firmes qui ont pignon sur rue sur le territoire et qui sont ainsi plus au fait des exigences du règlement. Le règlement CO 2017 950 adopté en juillet est disponible sur le site web de la Ville.