Justice
Faits divers

Rideau levé sur un des plus importants réseaux criminels du Canada

le jeudi 01 juin 2017
Modifié à 0 h 00 min le 01 juin 2017

JUSTICE. Un témoin repenti a donné un aperçu du fonctionnement d'un vaste réseau de drogues qui aurait tenté de s'imposer de force dans l'importation de cocaïne au Canada.

Le procès d'un des transporteurs du groupe, Sébastien Dolan-Sanchez, a commencé le 30 mai au palais de justice de Longueuil. Il s'agit de l'un des nombreux procès entamés à la suite du projet Loquace, une vaste frappe policière qui a mené à l'arrestation de 132 individus en 2012 et 2013.

Selon la police, le réseau était dirigé par un consortium de six individus liés à différents éléments du crime organisé, dont les Hells Angels, la mafia et la pègre irlandaise.

Selon le témoin repenti, qui a témoigné mercredi et jeudi, le réseau vendait d'importantes quantités de marijuana aux États-Unis. Il importait également de la cocaïne d'un cartel mexicain. L'argent et la marchandise transigeait par un ranch situé au nord de Laval.

De la marijuana à la cocaïne

Au sein du consortium, le transport outre-frontière était sous la responsabilité de Timoléon «Drake» Psiharis, selon le témoin repenti. Psiharis a échappé aux policiers avant l'opération Loquace, mais il a été assassiné et démembré en Grèce peu après la frappe.

Le témoin a raconté comment une équipe de six chauffeurs exportait la marijuana à différents clients américains. De faux réservoirs à diesel étaient installés à l'arrière du camion. Une partie du réservoir contenait bel et bien du carburant, afin de tromper des inspecteurs curieux, mais la majeure partie était remplie de 100 à 180 lb de cannabis.

Les chauffeurs devaient installer du lettrage portant le nom de la compagnie Transport Denis Corbeil afin de traverser la frontière. Officiellement, ils allaient chercher une roulotte en Indiana. Mais en plus de la roulotte, ils revenaient avec l'argent de la vente de drogues, parfois plusieurs millions de dollars.

Un jour, la marchandise aurait changé. Au lieu des clients habituels, les chauffeurs faisaient désormais affaire avec des Mexicains. Et au lieu de repartir avec des sacs d'argent, ils repartaient avec des boîtes brunes très lourdes. Le témoin aurait appris plus tard qu'il s'agissait de cocaïne.

Prêt à foncer sur des policiers

Par le biais de ses runners, Psiharis récupérait l'argent des exportations ainsi que la cocaïne importée et déposée au ranch. L'argent était déposé dans un bureau de change Globex 2000 situé dans l'Ouest de l'île de Montréal.

Quant à la cocaïne, elle était apportée chez Anastasios «Pitbull» Lagis, décrit comme «l'homme de main» de Psiharis.

«C'est quelqu'un qui aimait vraiment se battre. Et il était vraiment dangereux quand il voulait se battre», a illustré le témoin.

Selon ce dernier, Lagis suivait la voiture qui transportait la cocaïne jusqu'à son condo. Si le runner se faisait accoster par un policier, Lagis devait lui foncer dessus avec sa voiture afin de donner une chance au runner de s'enfuir.

Une fois la marchandise déposée chez Lagis, celui-ci était responsable du contrôle de qualité.

Distribution de cocaïne à Montréal

La cocaïne était ensuite distribuée à différents clients, dont le plus important était Frédéric Lavoie, affirme le témoin repenti.

Selon différents reportages publiés depuis l'opération Loquace, Lavoie était un proche des Hells Angels. Comme Psiharis, il a échappé à la frappe de novembre 2012, mais son corps démembré a été retrouvé en Colombie.

Selon le témoin, Lavoie faisait également partie du consortium de six individus dirigeant le réseau. Il avait une organisation «immense» de redistribution de cocaïne, principalement dans la région de Montréal.

«Avec Fred, ce n'était pas de grosses quantités par client. Mais il y avait beaucoup de clients, alors à la fin de la journée ça faisait des grosses sommes», a expliqué le témoin.

Lavoie aurait vendu entre 1 et 5 kg de cocaïne par transport, jusqu'à dix fois par jour. Le groupe vendait la cocaïne au moins 55 000$ le kilogramme.

Le témoin affirme avoir vu passer entre 1000 et 1500 kg de cocaïne, entre 3000 et 4000 lb de marijuana et au moins 15 M$ pendant son passage au sein de l'organisation criminelle.

La police estime que le consortium avait un chiffre d'affaires d'environ 50 M$.