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Tarification jugée excessive: les pêcheurs sportifs en ont assez

le lundi 06 juin 2016
Modifié à 0 h 00 min le 06 juin 2016

MANIFESTATION. Les pêcheurs sportifs n'ont pas le cœur à la fête. Même si le week-end du 3 au 5 juin soulignait la Fête de la pêche, ils en ont plutôt profité pour tenir un rassemblement, le 4 juin, au parc de la Commune de Varennes, afin de dénoncer la «privatisation des plans d'eau publics» à travers le Québec.

À l'occasion de la Fête de la pêche, les Québécois pouvaient taquiner le poisson sans avoir à se procurer un permis. Un paradoxe, juge l'Association des pêcheurs sportifs du Québec (APSQ), puisque ce passe-droit d'une fin de semaine vise à donner accès aux cours d'eau à tout un chacun, tandis que les cours d'eau sont en réalité de moins en moins accessibles.

«D'un côté, on encourage les gens à s'initier à la pêche, mais d'un autre côté, on leur met des bâtons dans les roues», déplore le président de l'APSQ, Stéphan Bourgeois.

Accès onéreux

Si les cours d'eau se privatisent, c'est en partie en raison des rampes de mise à l'eau pour les embarcations qui sont de plus en plus dispendieuses à utiliser, estime l'AQPS.

Par exemple, à Verchères, les non-résidents doivent débourser 300$ pour chaque mise à l'eau durant l'été. À Longueuil, des permis saisonniers sont vendus à 100 ou 400$, selon que l'individu soit résident ou non-résident, en plus des frais de stationnement de 30$ par jour et de 15$ supplémentaires par invité. À Varennes, un montant de 600$ est exigé, sans possibilité de tarification quotidienne.

«Au Québec, il semblerait que les plans d'eau appartiennent à ceux qui ont les moyens de payer pour les rampes de mise à l'eau et de s'acheter une maison en bordure d'un lac ou d'une rivière, regrette Stéphan Bourgeois. Pourtant, la loi stipule qu'ils appartiennent à tous les Canadiens et que si le plan d'eau est navigable, nul ne peut y empêcher l'accès pour la navigation.»

Quelques rampes de mise à l'eau sont toujours gratuites, mais donnent pour la plupart accès à des secteurs enclavés du fleuve, qui attirent peu l'attention des pêcheurs sportifs.

«Nous, les pêcheurs, on aime se promener à travers le Québec, sur différents plans d'eau. Si on doit payer 400$ à un endroit, 300$ à l'autre et 600$ là-bas, ça devient démesuré à la fin de l'été, dénonce M. Bourgeois. Là, on doit se limiter à un seul secteur et certains arrêtent tout simplement la pêche puisque c'est trop dispendieux.»

«Le pire, c'est que cette tarification-là n'est pas pour rénover ni pour amasser de l'argent, mais simplement pour qu'il y ait moins d'achalandage», ajoute-t-il.

Rassemblement

Le 4 juin, au parc de la Commune de Varennes, Stéphan Bourgeois a réussi à attirer une vingtaine de personnes qui ont rallié leurs voix aux revendications de l'APSQ.

«Le but, c'était de se faire entendre, se faire voir, affirme M. Bourgeois. On sait que les ministres [Martin Coiteux et Laurent Lessard] sont au courant de par le projet-pilote, mais on trouve que ça n'avance pas assez vite. On veut qu'un accès public soit prévu dans l'aménagement de chaque plan d'eau.»

Quant à la tarification jugée excessive à certains endroits, M. Bourgeois propose notamment l'implantation d'une somme à débourser afin d'obtenir un numéro d'immatriculation de Transport Canada pour les bateaux ayant des moteurs de 10 chevaux et plus, ce qui est gratuit actuellement.

«Nous pourrions sans doute payer un certain montant et cet argent pourrait être utilisé afin de construire et entretenir des sites de mise à l'eau. Ce pourrait être renouvelable chaque année, comme pour les VTT et les motoneiges», imagine-t-il.

Il propose également de percevoir une taxe lors de la vente d'embarcations entre particuliers et de taxer les ventes d'embarcations nautiques, les équipements de pêche et l'essence vendue dans les marinas afin de financer les rampes de mise à l'eau.

Projet-pilote

Le ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs a récemment annoncé qu'il mènerait un projet-pilote où il financera jusqu'à 150 000$ des projets d'aménagement servant à faciliter l'accès à un plan d'eau. Le ministère contribuera jusqu'à 40% du projet, jusqu'à un maximum de 50 000$.

Un comité est en place afin de faire l'analyse des projets soumis par les municipalités. Du côté du ministère, on insiste afin de limiter la «tarification excessive» imposée par plusieurs villes.

«Le prix imposé par certaines municipalités est ridicule. Devoir payer 400$ pour un usage unique, c'est inacceptable, concède l'attaché politique du ministre Laurent Lessard, Mathieu Gaudreault. On veut améliorer l'accès en améliorant les infrastructures. Les villes qui vont vouloir profiter de ce financement sont obligées de nous décrire le plan de tarification, et le projet ne passera que si cette tarification est jugée raisonnable par le comité.»

Le président de l'Association des pêcheurs sportifs du Québec (AQPS), Stéphan Bourgeois, n'est toutefois pas convaincu de la bonne foi des municipalités dans ce processus.

«Les villes qui ne veulent pas nous voir n'embarqueront tout simplement pas dans le projet-pilote et vont garder leur tarification trop élevée, estime-t-il. Lors d'une réunion du conseil municipal de Pointe-aux-Trembles, un élu a même dit que de toute façon, les gens qui allaient chialer, ce ne sont pas des résidents!»

Le comité est toujours à évaluer les projets qui lui ont été soumis. (A.K.-S.)