Justice

Sous l’emprise de l’alcool, il tue son meilleur ami à coups de couteau

le mercredi 07 février 2018
Modifié à 15 h 43 min le 07 février 2018
HOMICIDE. Réjean Cayouette a plaidé coupable à une accusation d’homicide involontaire à l’endroit de Daniel Patry, lundi au palais de justice de Longueuil. Le résident de l’arr. Saint-Hubert a reconnu avoir poignardé à mort son ami de longue date qui l’hébergeait depuis quelques temps, alors qu’il était fortement intoxiqué par l’alcool. L’homme de 61 ans a été condamné à 11 ans de prison; 18 mois seront déduits de cette sentence en raison du temps déjà purgé en détention préventive. Le juge Marc Bisson s’est ainsi plié à la suggestion commune de la procureure de la Couronne Suzanne Hébert et de l’avocat de la défense Normand Boudreault. Macabre découverte À 22h10, dans la soirée du 17 décembre 2016, un appel inaudible est logé à la centrale 911 à partir d’une résidence de la rue Prince-Charles, dans l’arr. de Saint-Hubert. Les policiers arrivent sur les lieux quelques minutes plus tard mais se heurtent à une porte verrouillée et n’obtiennent aucune réponse. Ils constatent par la fenêtre qu’il semble y avoir du mouvement à l’intérieur. Un des agents monte alors sur une poubelle et réussit à apercevoir un individu affaissé sur un fauteuil, un couteau planté dans la poitrine jusqu’au manche. Réjean Cayouette est assis sur le fauteuil, souffrant de blessures importantes, et a les mains et le chandail tâchés de sang. Il est conscient mais confus. Les policiers forcent alors la porte de la résidence et y font la découverte d’un autre individu ensanglanté, couché sur une table basse. L’homme semble décédé. Les ambulanciers tentent sans succès de réanimer la victime, plus tard identifiée comme étant Daniel Patry, 65 ans. Son décès est constaté dans un centre hospitalier plus tard dans la nuit. Propos suicidaires Cayouette est opéré dans les heures qui suivent et restera hospitalisé jusqu’au 3 février. Dès le lendemain de son congé de l’hôpital, des policiers répondent à un appel concernant un homme en détresse qui tiendrait des propos suicidaires. Il s’agit de Réjean Cayouette. À l’arrivée des agents, l’individu leur mentionne être responsable de la mort de son ami et qu’il désire mettre fin à ses jours. «J’ai pu de domicile car j’ai tué mon ami… j’me souviens de rien… Je ne sais pas ce qui s’est passé…, avoue Cayouette. Veux-tu que je vous dise quelque chose… J’ai tué mon ami inconsciemment entre Noël et le jour de l’An. Si vous n’étiez pas là, je regardais la place possible pour une pendaison.» Les policiers procèdent alors à son arrestation. Il sera officiellement interrogé le lendemain. «Meilleur ami» Daniel Patry et Réjean Cayouette étaient des amis très proches et se connaissaient depuis 30 ans. L’accusée disait de la victime qu’il était son «meilleur ami». Peu de temps avant le drame, le logement où résidait Cayouette est passé au feu et ce dernier n’avait plus d’endroit où vivre. Daniel Patry avait alors accepté de l’héberger temporairement. Il l’avait déjà accueilli chez lui en 2010. Selon ce qui a été rapporté en Cour, les deux hommes consommaient une grande quantité d’alcool lorsqu’ils étaient ensemble. Ils pouvaient acheter jusqu’à deux caisses de 24 bières quotidiennement. Selon Cayouette, son ami lui faisait des reproches et devenait «picosseux» lorsqu’il consommait. Pendant environ deux semaines avant le drame, la relation était tendue entre les deux hommes car Patry voulait que Cayouette s’en aille. L’accusé affirme que Patry «était à prendre avec des pincettes» et «n’était pas parlable». Selon le frère de l’accusé, Cayouette pouvait quant à lui devenir agressif lorsqu’il buvait. Patry avait peur de son colocataire et il lui arrivait même de dormir avec une hachette sur sa table de chevet. «Chaud en criss» Cayouette a des problèmes de consommation d’alcool depuis de nombreuses années. Il possède une dizaine d’antécédents en matière de conduite avec facultés affaiblies, dont la plus ancienne remonte à 1979. Le juge a d’ailleurs mentionné que la consommation d’alcool de l’accusé était un élément prédominant de la trame factuelle du drame. Selon l’accusé, le ton a monté entre les deux hommes le soir du meurtre. De l’aveu même de Cayouette, il était «chaud en criss» ce soir-là. Patry était également dans un état d’ébriété avancé. Pour des raisons qui restent toujours nébuleuses, une altercation aurait éclaté entre les deux individus. L’accusé a expliqué lors de son interrogatoire qu’au moment de passer à l’acte, Patry lui disait qu’il «étais un monstre. Il n’arrêtait plus […] Aurait fallu que je m’en aille, mais j’avais pas d’argent, il faisait frette, pas de place à aller.» Selon les enquêteurs, la victime a reçu une quinzaine coups de couteau ainsi qu’un coup de bouteille de bière dans l’altercation. Cayouette a mentionné avoir un souvenir flou de l’événement en raison de son haut niveau d’intoxication et a expliqué qu’il «a perdu des bouttes». «J’étais une bête, fou raide, raconte l’accusé. C’est dur de trouver les mots […] J’ai sauté une coche, perdu le contrôle complètement […] J’ai perdu complètement la tête. Je suis allé chercher un couteau pis je l’ai piqué au cœur… Pis après ça,  je me suis dit: je l’ai poignardé, il va appeler la police. De toute façon, c’est fini, je suis dehors. Ma vie est finie. Ça s’arrête drette icite à soir.» Il a ensuite expliqué avoir retourné l’arme du crime contre lui. «J’étais en train de me poignarder mais j’ai pas eu le temps de pogner le cœur.» Cayouette a confié avoir fait plusieurs tentatives de suicide par le passé et qu’il avait des idées noires depuis quelques temps. «C’est moé qui voulait mourir, c’est lui qui est mort», résume l’accusé. Remords Plusieurs membres de la famille de la victime étaient présents lors de l’audience, dont ses enfants, ses frères et sa sœur. L’accusé s’est excusé auprès d’eux, exprimant sa «honte» et ses «remords». «J’ai fait la pire erreur de ma vie ce soir-là et ça, je pourrai jamais me le pardonner», a déclaré Réjean Cayouette. Il s’est engagé à suivre une thérapie sur la consommation d’alcool au cours de sa détention.

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