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20% plus de signalements à la DPJ Montérégie: un effet de l’onde de choc créée par la tragédie de Granby

le mercredi 23 septembre 2020
Modifié à 15 h 34 min le 23 septembre 2020
Par Ali Dostie

adostie@gravitemedia.com

Le nombre de signalements reçus à la Direction de la protection de la jeunesse (DPJ) de la Montérégie a bondi de 20,4% en 2019-2020; une hausse deux fois plus élevée que celle du dernier bilan. Le «lot d’inquiétudes» suscitées par la tragédie de la fillette de Granby, survenue en avril 2019, explique cette recrudescence. D’avril 2019 à mars 2020, 18 033 signalements ont été traités par la DPJ de la Montérégie. Malgré la courbe croissante de 20%, le nombre de signalements retenus (33%) demeure similaire à l’année précédente, a relevé la directrice Josée Morneau, lors de la présentation du bilan 2019-2020, le 23 septembre. Concrètement, ce bilan se traduit par 49 situations d’enfants signalées par jour, soit 8 situations de plus que l’an dernier, au quotidien. [caption id="attachment_99935" align="alignright" width="444"] La directrice de la DPJ de la Montérégie Josée Morneau[/caption] Si cette hausse est plus forte que dans l’ensemble du Québec (+12%), le bilan de la Montérégie est toutefois plus bas au chapitre du nombre de signalement par 1000 enfants, soit 64, comparativement à 75 à l’échelle de la province. La négligence, les abus physiques et les mauvais traitements psychologiques sont les problèmes les plus signalés, dans une proportion respective de 29,8%, 21,2% et 18,7%. La hausse du nombre de signalements confirme le défi d’augmenter la capacité d’évaluation de tous ces cas, indique la DPJ. L’objectif est d’établir un premier contact à l’intérieur de 30 jours. Mme Morneau se réjouit de la diminution du nombre de dossiers en attente. «On a une belle liste d’attente: 120 dossiers, c’est du jamais-vu. C’est une progression majeure pour la Montérégie. C’est le résultat de plusieurs actions mises en place, dont une association avec les services de première ligne en jeunesse. On intervient de plus en plus ensemble.» Sensibiliser davantage l’entourage La plus grande part des signalements proviennent des organismes (32%), des milieux de garde et scolaire (23%) ainsi que du milieu policier (19%). Mme Morneau s’inquiète de la faible proportion des signalements qui proviennent de l’entourage de l’enfant; 16% sont fait par le milieu familial, et 9% par la communauté. «C’est très peu», constate-t-elle. La DPJ de la Montérégie espère sensibiliser davantage la population à l’importance de demeurer vigilant et de «développer le réflexe de protéger, sans avoir la crainte de signaler». «Agir ensemble, ce sont tous ceux qui sont autour des enfants et qui veillent sur eux… père, mère, voisinage, famille, organismes, profs…Ce sont mille et une personne.»
«Il n’y a pas de petit geste. Tout geste pour développement de l’enfant est important. C’est de prendre chacun nos responsabilités.» -Josée Morneau, directrice de la DPJ de la Montérégie
L’effet du confinement Ce message résonne tout particulièrement, alors que les écoles et garderies sont demeurées fermées pendant des mois en raison de la pandémie. La DPJ confirme effectivement une baisse du nombre de signalements de l’ordre de 13% entre avril et juin 2020, comparativement à la même période l’an dernier. Une situation qui s’est légèrement résorbée depuis. «On a poursuivi notre travail avec nos partenaires des garderies et du milieu scolaire qui, eux, maintenaient un lien virtuel avec les enfants. Les garderies et écoles sont nos yeux, nos oreilles. Leur fermeture a amené un défi, mais on s’est ajusté.» Le DPJ s’est aussi assurée de créer un «pont» entre les milieux scolaire et de garde ainsi que les services de première ligne, pour une intervention auprès des familles dans le besoin, même si ce n’est pas de nature à un signalement. Commission Laurent: agir avant les recommandations La DPJ de la Montérégie suit évidemment de près les travaux de la Commission spéciale sur le droit de l’enfant et la protection de la jeunesse et attend «avec impatience» les recommandations, mais a déjà commencé à agir pour «avoir des zones d’amélioration». Pour soutenir les familles vulnérables, Mme Morneau nomme entre autres un travail avec des partenaires, dont un qui agit dans une école d’un milieu défavorisé, pour effecteur plus de prévention. Le passage vers la vie adulte des adolescents passés par les centres jeunesse a aussi été identifié comme un enjeu à la Commission. La DPJ déploie des efforts pour créer des liens entre les services disponibles et le jeune. Des postes d’intervenants supplémentaires ont été créées pour le Programme qualification jeunesse, auquel participe la Montérégie.  

Des partenaires qui unissent forces et expertises

[caption id="attachment_99936" align="alignright" width="308"] Saloua Hassoun, de la Maison internationale de la Rive-Sud[/caption] La directrice de la DPJ de la Montérégie Josée Morneau a insisté, rappelant le thème Plus forts ensemble du bilan 2019-2020 des DPJ, sur l’importance de multiplier les approches et expertises pour venir en aide aux familles et protéger la vie des enfants. La Maison internationale de la Rive-Sud, qui soutient les nouveaux arrivants s’installant dans la région, bénéficie d’une entente avec les centres jeunesses de la Montérégie. «On entre en scène pour adapter les interventions en fonction du pluralisme culturel de la société, a expliqué l’intervenante Saloua Hassoun, lors de la présentation du bilan de la DPJ sur Zoom. Les personnes immigrantes doivent être familiarisées avec le modèle d’éducation québécois.» «On doit dire, par exemple, qu’il y a la Loi sur la protection de la jeunesse qui interdit des pratiques que vous aviez l’habitude de pratiquer chez vous.» Mme Morneau se réjouit du succès de ces interventions; non seulement la DPJ peut se retirer de la majorité des cas, mais elle n’est pas sollicitée à nouveau. «Souvent, on voyait, après la sensibilisation, une ouverture, mais c’est autre chose de l’appliquer. Là, on est dans quelque chose de vraiment permanent.» Le pouvoir de l’art [caption id="attachment_99933" align="alignleft" width="358"] L'artiste Amélie Pellerin[/caption] L’organisme Les Impatients, qui offre entre autres des ateliers de création artistique à des personnes ayant des problèmes de santé mentale, contribue aussi à sa façon au mieux-être des jeunes. «Pourquoi on fait des miracles? On a des animateurs qui sont des artistes avant tout», a avancé le directeur général Frédéric Palardy. Amélie Pellerin, artiste accompagnatrice qui donne des ateliers à des résidents des centres jeunesse, a témoigné de la force de l’impact de ces activités et de l’art sur ces adolescents. Dans ces ateliers, ils apprennent tant à dessiner et à bricoler que le savoir-vivre et le savoir-être. Elle a raconté une anecdote à propos d’un «garçon-soleil, qui avait brûlé toutes les familles qui s’étaient essayées à l’adopter». Participant activement aux ateliers, toujours près d’elle, il lui pinçait parfois légèrement la jambe. Pourquoi? lui a-t-elle demandé. «Parce que j’ai peur que les personnes que j’aime disparaissent. Je veux être sûr qu’elles sont réelles.»   Nombre de signalements traités et retenus par RLS -RLS Pierre-Boucher : 3168 traités (+384 comparativement à 2018-2019), 1070 retenus   -RLS Champlain – Charles-LeMoyne : 2077 traités (+336 comparativement à 2018-2019), 752 retenus   Répartition des signalements retenus selon l’âge En Montérégie -0-5 ans : 29% -6-12 ans : 45% -13-15 ans : 17,5% -16-17 ans : 7% -Inconnu : 0,6%