Chroniques
Opinion

Affaire Éric Lapointe : quel message envoie-t-on ?

le mardi 03 novembre 2020
Modifié à 12 h 33 min le 30 octobre 2020
Par Claude Poirier

redactiongm@gravitemedia.com

Il y a quelques jours, nous apprenions que le dossier d’Éric Lapointe – qui a plaidé coupable à des voies de fait sur une femme –  s’est conclu à la cour municipale. Il y a eu ici couchette entre la défense et la couronne; ils ont demandé l’absolution conditionnelle pour le chanteur, une probation d’un an, une thérapie pour ses problèmes d’alcool et un don de 3 000$ à un organisme. Le juge a entériné cette suggestion. Ces dernières années, des groupes de femmes à travers le monde militent pour que la violence et les agressions sexuelles envers elles soient dénoncées. Quel message leur envoie-t-on? Éric Lapointe a payé cher au niveau de sa carrière, dira-t-on. Mais quand tu es une personnalité publique, tu te dois d’être d’autant plus prudent dans tes actions. S’il ne respecte pas les conditions émises par le juge, sa sentence d’absolution et sa probation d’un an ne seront plus en vigueur. Quand tu fais les manchettes ainsi et que ta carrière en écope, ce sont des conséquences graves. Il faut toutefois penser aux victimes. Et celle dans le dossier dont on parle semblait très ébranlée. Je crois que la sentence du chanteur lui a été favorable en raison de son statut. Quand c’est une affaire impliquant quelqu’un de célèbre, ç’a un impact. La justice doit réfléchir à cela. Je comprends la réaction des groupes de femmes qui se battent contre la violence et les agressions sexuelles. On l’a vu récemment. Combien de victimes ont vécu avec leur secret pendant des années sans dénoncer? Quand une femme décide de se prendre en main – si vous me permettez l’expression –, elle sait qu’elle s’embarque dans un processus judiciaire long et difficile. Quand on voit une décision comme celle qui a été rendue dans cette affaire, ça fait réfléchir énormément de femmes. J’ai reçu plusieurs messages à ce sujet. On m’a dit: «Vous nous dites de dénoncer à la justice, eh bien, voyez ce que ça donne.» Il va falloir que quelque chose change, notamment au ministère de la Justice et au Conseil de la magistrature. Il y a des précautions à prendre. Souvent, les juges sont coincés quand la couronne et la défense ont une suggestion de sentence commune. Est-ce que les soutanes rouges et noires doivent s’y plier? Je ne crois pas. Si on veut que la violence envers les femmes diminue, il faut que ça bouge. Le message qu’on vient d’envoyer empêchera des victimes de dénoncer devant les tribunaux. 10-4! (Propos recueillis par Gravité Média)