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Andrei Markov, une des grandes vedettes du CH

le mardi 28 mars 2017
Modifié à 0 h 00 min le 28 mars 2017

Nul doute que nous aurions préféré une belle histoire bien canadienne-française, celle d'un jeune Québécois issu d'un quartier modeste qui devient un joueur important du Canadien de Montréal après avoir franchi des montagnes d'adversité pour se rendre au sommet et être ovationné dans le temple (maintenant le Centre Bell).

Mais non, cette histoire ne raconte pas la vie d'un petit gars de chez nous, qui envers et contre tous, a réussi. C'est le récit d'un jeune joueur russe originaire de  Voskressensk, qui débarquait un jour à Montréal avec peu de mots, à peine quelques mots d'anglais et encore moins de français.

Son nom, c'est Andrei Markov.

Son histoire ne sera pas aussi emblématique que celle de Jean Béliveau ou de Maurice Rocket Richard, n'allons pas trop loin. Mais à son arrivée, Markov appartenait à une jeune génération de joueurs russes, qui entraient timidement dans la LNH après avoir été repêchés dans les dernières rondes de l'encan amateur de la LNH, puisqu'à cette époque, on ne sélectionnait pas de joueurs russes dans les premières rondes, de peur qu'ils boudent l'Amérique en ne voulant pas quitter leur patrie pour faire carrière ici.

Taciturne, méfiant, distant et froid, c'étaient les qualificatifs avec lesquels on décrivait la personnalité de Markov. À ses débuts avec le CH, on l'avait retranché à Québec chez les Citadelles pour parfaire son développement. Ce fut ma première rencontre avec lui.

Heureux de voir arriver du talent, débarqué de l'autoroute 20, nous avions hâte de rencontrer Andrei. Nous avions bien des questions pour lui et étions tous curieux de voir de nos propres yeux celui dont on parlait à Montréal.

La mêlée de presse de Markov a duré trois minutes à peine et ça inclut environ 4-5 questions. Andrei n'a pas soufflé une seule réponse. Pour lui, Québec c'était la Sibérie. Non pas parce que la Vieille Capitale n'avait pas de charme ou était trop froide, mais quand j'ai rencontré Markov, il était déçu et frustré. Frustré d'avoir été cédé au club-école. Heureusement pour lui, le voyage en Sibérie a été très court. On n'a jamais revu Markov porter le chandail du club-école quand il a été rappelé, il n'a jamais quitté Montréal.

Aujourd'hui, il est à peine plus généreux qu'à ses débuts lors de ses rencontres avec les journalistes. En fait, il faut le prendre pendant ses bons jours, sinon, il n'y a rien à faire. Markov n'aime pas parler des autres joueurs et il n'aime pas parler de lui. En fait, Andrei n'aime pas nous parler tout court. Au-delà de ça, il est probablement une des plus belles histoires qu'on a racontées ces dernières années.

Depuis une décennie, le joueur le plus fidèle du CH

Il a été le joueur le plus fidèle que le Canadien a eu depuis une décennie. Il ne s'appelle pas Roy, Richer ni Damphousse, son nom c'est Markov.

À trois reprises au cours de sa carrière, Markov aurait pu bénéficier des largesses du marché de l'autonomie dans la LNH. En 2007, dernière année de Sheldon Souray avec le Canadien, Bob Gainey devait faire le choix entre eux, une décision qui s'annonçait déchirante car ce dernier avait connu une excellente saison avec le Canadien. Étonnamment, c'est Andrei Markov qui a fait le choix et non Gainey. À l'époque, les bruits couraient à l'effet que les Rangers étaient désireux d'offrir un contrat faramineux au 79 du Canadien pour établir les bases d'une équipe championne.

Si le CH ne s'entendait pas avec lui, il était parti. Mais à quelques jours de l'ouverture du marché des joueurs autonomes, Andrei a choisi le CH.

À partir de ce moment, il a toujours choisi Montréal. Les quelques fois qu'il a bien voulu se confier à quelques collègues journalistes, il a toujours parlé de Montréal comme de sa deuxième maison. Car oui, Markov est un patriote, un athlète fier de sa Russie natale, car en plus de porter le chandail du Canadien durant toutes ces années, à chaque fois que son pays a eu besoin de lui, il s'est porté volontaire.

Montréal est tellement sa deuxième maison qu'il est, rappelons-le, un citoyen canadien.

Ce qu'il y a de plus formidable à propos de Markov est d'entendre les récits de ceux qu'il côtoie ou qui ont joué avec lui pour comprendre sa grande valeur. Benoit Brunet, ancien porte-couleur du Canadien et maintenant analyse à RDS et à Cogeco Sports, racontait le premier camp d'entraînement de Markov avec le CH. L'anecdote est savoureuse. Lors des premiers matchs intra équipes, les grandes vedettes du CH de l'époque étaient toutes intriguées par ce Russe renfermé. C'est sur la glace, comme Ben aime le raconter, que les joueurs ont vite compris à qui ils avaient affaire quand ils recevaient des passes du 79. Déjà à l'époque, ses passes faisaient de la musique sur les palettes de ses coéquipiers.

Quelques années plus tard, ça prenait encore des étrangers pour nous raconter comment Markov maîtrise son art. Durant l'année du centenaire, entre deux graves blessures au genou, Markov, le matin du match d'étoiles, s'entraînait sur la glace du Centre Bell avec d'autres grandes vedettes de la LNH. Après la pratique, je déambulais dans le vestiaire à la recherche d'une bonne histoire... et les bonnes histoires sont rares au match d'étoiles! À ce moment, Vincent Lecavalier et Martin St-Louis, coéquipiers de Markov, venaient de terminer leur entraînement en vue d'un match qui ne voulait rien dire.

Cette année-là, Lecavalier se trouvait en pleine tempête médiatique, faisant face à des rumeurs persistantes d'une transaction l'amenant à Montréal. Un peu tanné de répondre à ces questions concernant son avenir, Lecavalier voulait parler d'autre chose.

Après la horde de micros et de caméras, je me suis faufilé entre lui et St-Louis. Tout à coup, ils se sont mis à me parler de Markov. Habitués de l'affronter, ils venaient de terminer un entraînement avec lui. Les deux se racontaient à quel point les passes de Markov étaient impressionnantes. J'étais le témoin privilégié, avec mon micro, de cette conversation.

« Heille, t'as-tu vu ça Marty ?». Et St-Louis de répondre: «c'est incroyable. Tu poses le bâton sur la glace et soudain, bang!, la rondelle arrive de nulle part.» Deux grandes vedettes de chez nous témoignaient de ce que Markov peut faire sur une patinoire.

Quelques années et quelques blessures plus tard, le 79 est toujours là. Alors que Marc Bergevin est incapable de dénicher un défenseur gaucher à la date limite des échanges pour jouer avec Shea Weber, le CH doit se tourner vers le bon vieux Andrei. Et ce week-end, après deux débâcles contre Détroit et la Caroline, c'est Andrei qui a encore donné le show face aux Sénateurs (trois points).

Peu de joueurs dans le futur pourront répondre aux critères d'évaluation quand viendra le temps d'ajouter une bannière et un nom à celles qui sont déjà au plafond du Centre Bell. Eh bien oui, pour moi, le prochain qui mérite son chandail retiré avec les grandes vedettes du CH, ce sera Andrei Markov.

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