Culture

Au-delà du personnage Michel Chartrand, une lutte à poursuivre

le lundi 14 novembre 2016
Modifié à 0 h 00 min le 14 novembre 2016
Par Ali Dostie

adostie@gravitemedia.com

LIVRE. À bas les tueurs d'oiseaux! révèle un autre Michel Chartrand que l'image du personnage public qui en est restée: un homme généreux, doux, contemplatif, un grand-papa gâteau, un amant de la nature, de la lecture – journaux, poésie, sociologie, etc. – et de la musique classique.

C'est notamment pour faire découvrir toutes les facettes de son père – et ainsi lui rendre justice – que Suzanne-G. Chartrand, de concert avec un ami proche de Michel, Jean Gladu, a publié un recueil de témoignages et réflexions sur le parcours militant du célèbre syndicaliste.

«J'ai souvent été déçue, parfois choquée, parfois étonnée que mon père soit toujours dépeint de la même façon, vociférant, criant toujours les mêmes phrases, sacrant.»

Suzanne-G. Chartrand connaissait très bien le père de famille, mais aussi le militant, pour avoir mené les mêmes luttes à ses côtés. Dans À bas les tueurs d'oiseaux!, elle signe un texte très personnel et trace son parcours, mais a surtout rassemblé 29 témoignages d'amis, d'enfants et petits-enfants, de personnes qui ont croisé le chemin de Michel Chartrand et en ont été inspirés.

Ce recueil permet de mieux comprendre l'action menée par le défenseur des travailleurs et aussi de combler un certain vide quant aux publications qui s'attardent à son parcours, selon sa fille.

Elle explique notamment cette intensité et cette constance de son parcours par l'attachement profond de son père envers les valeurs du christianisme telles que la fraternité, la solidarité et l'amour du prochain.

Lettre depuis le Centre de détention Parthenais

Michel Chartrand a été emprisonné au Centre de détention Parthenais, le 16 octobre 1970, en pleine crise d'Octobre. La Loi sur les mesures de guerres autorisant les arrestations sans mandat ni chefs d'accusation.

«Il avait passé sa vie à être libre, à se battre pour la liberté. Quatre mois en prison, c'est long!», témoigne Suzanne-G. Chartrand. Cette dernière et sa mère Simonne Monet-Chartrand allaient le visiter chaque semaine et lui apportaient des livres.

Une lettre qu'a écrit Michel Chartrand à sa fille depuis la prison, soumise à la censure, se trouve dans À bas les tueurs d'oiseaux!, qui tire d'ailleurs son titre d'une phrase inscrite par Chartrand sur l'enveloppe de la lettre.

«Ç'a été pour lui le temps de descendre en lui-même et de faire une analyse de la société québécoise, analyse qui est d'ailleurs encore valable aujourd'hui, estime Mme Chartrand. Il dit qu'il ne faut pas perdre espoir. Il a toujours eu un grand espoir dans la jeunesse, qui peut trouver sa façon de se battre.»

Continuons le combat

Ayant tenu quelques activités de lancement un peu partout au Québec, Suzanne-G. Chartrand se réjouit de voir que les idéaux de son père trouvent encore écho, tant au sein des centrales syndicales que dans l'ensemble de la population.

 «Beaucoup de militants m'ont dit à quel point ça fait du bien d'entendre parler de lui, évoque-t-elle. Mais le problème, c'est que ce n'est pas assez.»

Car cet ouvrage qui, espère-t-elle, rejoindra les jeunes générations, vise aussi à rappeler l'importance de la lutte menée par Michel Chartrand, qui selon elle doit être poursuivie.

«Il faut aussi mener des actions, même minimes, pour éviter que la société ne devienne barbare, où on peut dire tout et n'importe quoi, où l'on assiste à l'érosion des libertés. Il faut se battre!, lance Mme Chartrand avec engouement. Le livre, c'est pour ça, pour stimuler!»

La pomme n'est visiblement pas tombée bien loin de l'arbre.