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Ce qu’il faut savoir sur la légalisation du cannabis
le mercredi 27 juin 2018
Modifié à 16 h 51 min le 27 juin 2018

LOI. Dès le 17 octobre, il sera permis de consommer du cannabis et de s’en procurer à l’une des succursales de la Société québécoise du cannabis (SQDC). Avec la nouvelle législation vient un ensemble de règles et restrictions, que nul ne sera censé ignorer.
Le Centre de justice de proximité de la Montérégie a prévu une première séance d’information sur le sujet à Brossard, le 28 juin à 18h. D’autres séances seront aussi planifiées à l’automne, à l’approche de l’entrée en vigueur de la loi.
«Oui, le cannabis sera légal, mais il y a un gros "mais". Ce sera encadré, très bien réglementé. Et ce n’est pas vrai que l’on pourra fumer n’importe comment. Car il y aura des sanctions très sévères», lance d’entrée de jeu la stagiaire et étudiante en droit Danika Valiquette, qui a mis sur pied la séance d’information.
À l’automne, une vingtaine de succursales de la SQDC devraient ouvrir leurs portes. Ce seront les seuls endroits où il sera autorisé de se procurer de la marijuana. La quantité maximale qu’il sera permis de détenir sur soi sera de 30g. «On ne pourra donc pas acheter plus de 30g par visite», explique Mme Valiquette. À la maison, la quantité maximale permise sera fixée à 150g.
Seul le cannabis séché sera vendu, mais des huiles pourraient éventuellement arriver sur le marché. La SCQ ne pourra toutefois pas mettre en vente des aliments dérivés, comme des bonbons ou des muffins au pot.
«Au Colorado, où le cannabis est légalisé, ils ont vu beaucoup de cas d’intoxication chez des enfants, à cause des gâteaux ou suçons», expose l’étudiante.
À l’instar du tabac, il ne sera pas autorisé de fumer du cannabis dans n’importe quel lieu public extérieur. Les mêmes restrictions s’appliqueront par exemple concernant les établissements d’enseignement. Il en sera de même pour la règle des neuf mètres.
«Selon la loi québécoise, il y aura 40 endroits où il sera interdit de consommer, incluant la salle de bingo!» donne en exemple Danika Valiquette. Des modifications au projet de loi pourraient toutefois être apportées, alors que la version papier n’est toujours pas publiée.
Les sanctions seront aussi sévères en cas d’infraction, variant de l’amende pour possession de 50g ou moins (mais plus de 30g) à l’emprisonnement, dans le cas notamment de distribution ou de vente de cannabis à des mineurs.
Néanmoins, certains flous demeurent et les gouvernements ont jusqu’à l’automne pour les combler.
«Le gouvernement fédéral n’a pas prévu de sanction si un mineur est pris avec moins de 5g de pot en sa possession», illustre Danika Valiquette.
Plants ou pas de plants à la maison?
Selon la loi canadienne, il sera autorisé de faire pousser au plus quatre plants de cannabis à la maison. Toutefois, la législation québécoise interdit toute culture de cannabis à domicile.
La question a fait débat entre le Sénat et le gouvernement fédéral, mais le premier ministre Justin Trudeau a maintenu sa position, faisant valoir que la culture à domicile permettrait de contrer le marché noir.
Puisque Québec et Ottawa ont tous deux refusé de contester l’autre législation, quelle règle a préséance?
«Le débat aura probablement lieu à la Cour suprême. Malheureusement, il va falloir qu’un citoyen se fasse arrêter et intente une poursuite pour déterminer que telle loi n’est pas constitutionnelle.»
Locataires et copropriétaires
Dès l’entrée en vigueur de la loi, les locateurs auront 90 jours pour envoyer, s’ils le souhaitent, un avis à leurs locataires leur interdisant de fumer du cannabis dans le logement. Un délai de 30 jours est ensuite accordé au locataire pour contester cet avis.
«La seule contestation valable sera pour une consommation pour des raisons médicales. C’est la Régie du logement qui tranchera», évoque Dalika Valiquette.
L’interdiction de fumer peut aussi s’appliquer aux mêmes espaces que le tabac, comme dans les corridors.
Du côté des copropriétés, la décision d’interdire la consommation de cannabis à l’intérieur des logements devra apparaître dans la déclaration de copropriété (acte constitutif), «préférablement dès sa publication, précise Mme Valiquette. Si ce n’est pas le cas, il sera par la suite difficile pour un syndicat, voire impossible d’interdire de fumer dans les parties privatives de l’immeuble.»
Pour modifier la destination de l'immeuble, il faut obtenir la majorité en nombre de 75% des copropriétaires, représentant au moins 90% des voix de tous les copropriétaires.
Concernant les espaces communs et les espaces communs à usages restreints tels que les balcons, c’est le règlement de l’immeuble qui doit être modifié, ce qui devra rallier la majorité des copropriétaires.
La loi entourant le cannabis prévoit une interdiction de fumer du cannabis dans les aires communes des immeubles d'habitation comportant deux logements ou plus. «Pour éviter d’engager sa responsabilité, un syndicat a intérêt à identifier, dans son règlement d’immeuble, les parties communes visées par la loi entourant le cannabis», avise l’étudiante.
Sur la route
La loi C46, adoptée en même temps que la loi sur le cannabis, ne prévoit pas actuellement les taux de facultés affaiblies par la consommation de cannabis sur la route.
Il y aura probablement différentes catégories d’infractions, comme c’est le cas avec l’alcool au volant.
Ce sera déterminé par règlements. Un article sera ajouté au Code criminel concernant spécifiquement la consommation de drogue au volant, et les sanctions qui en découleront.
Le gouvernement québécois souhaiterait que s’applique la tolérance zéro, alors que le Canada privilégierait un seuil à ne pas dépasser. «Une politique de tolérance zéro est plus facile à appliquer pour les policiers alors qu'une politique de différents taux exige un appareil de détection approuvé», explique Danika Valiquette.
Actuellement, les policiers n’utilisent pas d'appareil de dépistage lors d'une interception routière, mais plutôt des prises de sang effectuées postérieurement à l'infraction. Des tests ont été effectués avec un appareil, semblable à l’alcootest, qui permettra de détecter la présence de cannabis.
Au travail
Ayant une obligation d’assurer la santé et la sécurité des employés, les employeurs devront se doter d’une politique stricte concernant la consommation du cannabis, qui établirait des sanctions.
«L’élément-clé, c’est la notion de facultés affaiblies pendant les heures de travail. Par contre, il y a un flou concernant par exemple la consommation le matin si on travaille en soirée. C’est important que l’employeur vienne clarifier tout ça et mette cartes sur table. Ça commence à presser pour les employeurs.»
Des accommodements pourraient être accordés dans le cas de consommation pour des raisons médicales ou de dépendance. «Le droit du travail, c’est souvent du cas par cas.»
La séance d’information aura lieu le 28 juin de 18h à 19h, au 6300, avenue Auteuil, bureau 503, Brossard. Inscription obligatoire au 1 844 723-3700 ou à monteregie@cjpqc.ca