Le long chemin des ordures vers les lieux d’enfouissement

Le camion qui vient de prendre des déchets à Châteauguay va éventuellement prendre la route de Terrebonne, où se situe un lieu d'enfouissement technique. (Photo: Gravité Média ‒ Joëlle Bergeron)
Combien de kilomètres peut parcourir le sac de poubelle ramassé par le camion devant chez vous? Si vous habitez sur la Rive-Sud de Montréal, la réponse peut être plus de 100 km. Gravité Média a fouillé le monde des ordures afin de démystifier trois grandes questions liées aux dépotoirs.
Où vont les déchets?
Quand les poubelles partent de Longueuil, Châteauguay ou Salaberry-de-Valleyfield, c’est pour aller sur la Rive-Nord, au Centre-du-Québec ou en Estrie.
En Montérégie, il n’y a pas de dépotoirs autorisés et en exploitation.
Au Québec, cinq dépotoirs – appelé lieux d’enfouissement technique (LET) dans le jargon des ordures – reçoivent 80% des déchets de la province : ceux de Terrebonne (Lachenaie), Drummondville (Saint-Nicéphore), Lachute, Sainte-Sophie et Saint-Thomas. La plupart sont opérés par des multinationales américaines.
C’est là que sont ultimement acheminés la majorité des déchets de la Rive-Sud. Un plus petit site dans la région de Granby, à Sainte-Cécile-de-Milton, en reçoit aussi.
Parfois, des villes comme Longueuil ou Salaberry-de-Valleyfield envoient les ordures dans un site de transbordement dans leur propre ville, avant que celles-ci ne soient transportées dans un LET.
Qu’est-ce qui se passe avec les déchets dans ces lieux?
«Ils sont juste disposés dans un trou, littéralement. Chaque jour, les camions viennent déverser les vidanges. Ensuite, on doit mettre un matériel de recouvrement, soit de la terre ou un matériel équivalent approuvé par le ministère de l’Environnement», explique Karel Ménard, directeur général du Front commun québécois pour une gestion écologique des déchets.
Ces matériaux servent à éviter les nuisances comme des déchets qui s’envoleraient du site, à réduire un peu les odeurs qui s’échappent du site ou à faire fuir les animaux qui viennent manger ce qui reste de matières organiques.
Pour chaque tonne de déchets enfouis dans un LET, il doit y avoir 500 kg de matériel de recouvrement, ajoute M. Ménard.
Ces sites doivent faire l’objet d’un recouvrement final, c’est-à-dire de mettre une épaisseur de terre assez importante, sur laquelle on met de la végétation.
Même fermé, le site va produire du «jus de poubelle», appelé eaux de lixiviation, qui devra être traité pendant quelques années, tout comme les biogaz qui seront émis, à cause des matières organiques enfouies.
«Mais après ça, le site, s’il respecte certains critères sur le plan du suivi post-fermeture, il va être laissé à lui-même sans autre soucis», affirme M. Ménard.
Les sites sont-ils réellement saturés?
Pour Karel Ménard, «c’est un peu un épouvantail» de dire que les sites d’enfouissement seront bientôt saturés.
«Un lieu d’enfouissement technique, on sait quand il sera plein ou saturé dès son ouverture, parce la durée est déterminée avec un tonnage déterminé. C’est sûr qu’il va y avoir des sites à la fin de leur vie utile, de leur autorisation. Mais tous les sites près de la fin de leur utilisation légale sont en phase d’agrandissement», informe-t-il.
Dépendamment des décrets, les sites peuvent être bon pour 5, 10, 20 ans. Quelques années avant leur échéance, les compagnies préparent déjà leur agrandissement.
«Il n’y aura pas de crise d’enfouissement au Québec, comme on veut parfois nous faire croire. Il y aura toujours des lieux pour mettre les poubelles et il en faut! Même si je travaille pour un groupe en environnement, les lieux d’enfouissement technique font partie de la solution», souligne-t-il.