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Contravention remise à un policier: des propos tenus sur Facebook mettent fin aux procédures

le vendredi 30 juin 2017
Modifié à 0 h 00 min le 30 juin 2017
Par Ali Dostie

adostie@gravitemedia.com

COUR. Des propos tenus par Sébastien Théodore sur sa page Facebook ont mis fin au procès l'opposant à l'agent du Service de police de l'Agglomération de Longueuil Louis Savard-Déry.

Rappelons que M. Théodore avait obtenu le titre de poursuivant et remis une contravention au policier pour une infraction au Code de la sécurité routière, le 13 octobre 2015. Le patrouilleur aurait dépassé sur une ligne pleine alors qu'il ne répondait pas à un appel d'urgence. L'agent avait contesté la contravention.

Le 12 mai 2017, M. Théodore s'en est pris au policier ainsi qu'à l'ensemble du service de police sur sa page Facebook.

«Je vous informe que le service de police de Longueuil est corrompu et Louis Savard-Déry c'est une belle ordure […]. Des policiers corrompus comme ça je peux pas avoir du respect pour des trous de cul comme ça […]»

Dans un long message, il s'en est également pris à l'avocate au dossier, au Barreau, ainsi qu'à l'Assemblée nationale.

Dans une deuxième publication, le 1er juin, il a accusé Louis Savard-Déry d'avoir «commis un grave parjure», lui reprochant d'avoir raconté une «histoire complètement bidon» à la cour.

Le 8 juin, au moment où devaient avoir lieu les plaidoiries, l'avocate de l'agent Savard-Déry, Me Isabelle Briand, a déposé une demande en arrêt des procédures en raison de ces propos, avançant que M. Théodore a ainsi «agi de manière à entacher sa fonction, de façon abusive et irresponsable, en publiant un commentaire pour le moins désobligeant».

Selon le juge Pierre-Armand Tremblay, le «comportement inacceptable» de M. Théodore est la raison de la fin des procédures. «Les propos du poursuivant sont à ce point orduriers qu'il répugne au Tribunal de lui permettre d'agir de la sorte impunément et en intimidant le défendeur, et ce, dans sa propre cause», est-il décrit dans le jugement rendu le 28 juin.

«À ce stade du procès, ces commentaires injurieux et les menaces de parjures constituent de l'intimidation envers le défendeur», a-t-il ajouté.

Le jugement fait également état du comportement de M. Théodore tout au long du procès, ainsi qu'à l'«attitude de patience» du juge, qui a toléré que M. Théodore s'exprime comme et quand il le voulait, dans des propos «à la limite du convenable».

Bien qu'aucune règle écrite ne régit le devoir de réserve d'un poursuivant privé – tel que M. Théodore – le juge estime que «la limite du raisonnable a été ici non seulement franchie, mais dépassée par un nombre déraisonnable d'encablures qui ne permet plus de ramener le bateau à bon port».

Il précise que «la coupe qui débordait déjà au cours du procès a littéralement explosé lorsqu'il est allé jusqu'à laisser entendre qu'il poursuivrait le juge soussigné si celui-ci n'entamait pas des procédures en parjure contre le défendeur», et ce, avant même que le juge ne rende sa décision.

En appel

Sébastien Théodore compte porter la décision en appel. «Je veux que la justice soit respectée, que l'on respecte le principe constitutionnel et la primauté du droit. Je ne comprends pas pourquoi le juge a rendu une décision comme celle-là», se désole-t-il.

Il a d'ailleurs déposé deux plaintes au criminel contre l'agent Savard-Déry pour parjure.

Dans son témoignage, Louis Savard-Déry a plaidé que la ligne sur la chaussée était en mauvais état à un point tel qu'il croyait qu'il s'agissait d'une ligne pointillée. «La signalisation était très abîmée, ça m'apparaissait une ligne discontinue. Personnellement, je ne donnerais pas de constat à un citoyen. La signalisation n'est plus valide, n'est pas conforme», a-t-il témoigné le 11 mai. Le policier a de plus évoqué la chaussée mouillée qui nuisait à la visibilité de la ligne.

M. Théodore a déposé à la cour une photo du Courrier du Sud, datant de novembre 2015, sur laquelle on voit M. Théodore à l'intersection en question. La portion de la ligne visible sur la photo est en bon état.

«M. Déry a menti en pleine cour. La preuve est là», ne démord pas M. Théodore, qui nie également que le 13 octobre 2015 était une journée pluvieuse.

Sébastien Théodore accuse également M. Savard-Déry d'avoir menti dans son témoignage lorsqu'il rapporte leur discussion du 13 octobre 2015. «Il dit que je lui ai demandé qu'il contacte un autre policier pour qu'il vienne sur place, mais c'est faux, j'ai demandé qu'il appelle un supérieur.»

Lors de son témoignage, M. Savard-Déry a souligné qu'il n'avait pas le pouvoir d'appeler un autre policier, mais qu'il pouvait contacter un sergent, ce qu'aurait refusé M. Théodore.

Nombreuses démarches

Sébastien Théodore voit dans cette demande d'arrêt des procédures une autre façon pour le policier de se défiler de ses responsabilités. «C'est une autre perte de temps, une autre façon de contourner le dossier», déplore-t-il.

Il s'agit de la deuxième demande en arrêt des procédures déposé par la partie de M. Savard-Déry. Une première demande avait été déposée, à l'effet que les démarches de M. Théodore constituaient un abus de procédures et que les irrégularités du  constat produit par M. Théodore en annulaient la validité. La demande avait été rejetée en janvier 2017.

En octobre 2016, la défense avait également plaidé afin de déclarer M. Théodore «plaideur quérulent», ce qui n'avait pas été retenu.

Un changement d'avocats du défendeur avait de plus entraîné une demande de remise.