Coupures dans les cégeps : le personnel du collège Édouard-Montpetit au front
Une tête géante à l’effigie de la ministre Sonia Lebel, ministre responsable de l’Administration gouvernementale et présidente du Conseil du trésor, était arborée par les manifestants. (Photo: Le Courrier du Sud – Sylvain Daignault)
Afin de protester contre les récentes coupes budgétaires du gouvernement caquiste qui «mettent en péril» leur établissement et l'ensemble des cégeps de la province, une soixantaine de membres du personnel du collège Édouard-Montpetit (professeurs, professionnels et membres du personnel de soutien), avec l’appui de la direction, ont rendu une visite de courtoisie ce 31 octobre aux bureaux de la députée de Marie-Victorin, Shirley Dorismond, adjointe parlementaire du ministre responsable des Services sociaux.
En entrevue au Courrier du Sud lors de la marche, la présidente du Syndicat des professeures et des professeurs du cégep Édouard-Montpetit (SPPCEM), Phyllis Katrapani, dénonce, entre autres, le gel de recrutement pour les emplois réguliers et occasionnels pour le personnel administratif que devront appliquer les cégeps à compter du 1er novembre; un gel qui entraînera des conséquences directes sur les étudiants.
Chez le personnel professionnel, plusieurs personnes qui donnent des services directs aux personnes étudiantes : conseiller d’orientation, psychologue, travailleurs sociaux, aide pédagogique individuel et autres. Aussi, les emplois dits administratifs entraînent eux aussi des conséquences directes sur les étudiants.
Ces postes, continue la présidente, contribuent notamment au fonctionnement du réseau et des systèmes informatiques, à la protection des renseignements personnels et sécurité du réseau, à l’approvisionnement du matériel et des équipements utilisés en classe, à la bibliothèque et pour la vie étudiante.
Les coupures annoncées concernent également l’entretien du bâtiment, le soutien pédagogique pour les enseignants, la gestion des ressources humaines et le recrutement des futurs étudiants.
«Ces coupes arrivent alors que l’on connaît l'une des plus importantes hausses du nombre d'étudiants, alors qu'on devrait plutôt investir davantage dans le système d'éducation!» insiste dans un communiqué le Syndicat du personnel professionnel du Cégep Édouard-Montpetit.
«Hallucinant»
De son côté, le Syndicat du personnel de soutien du collège Édouard-Montpetit (SPSCÉM) qualifie «d’hallucinant» le fait de se retrouver une dizaine d'années plus tard à débattre du même problème avec un gouvernement différent, soit celui des coupes dans les services aux étudiants. «D'abord en les privant de matériel pédagogique essentiel comme des livres, de l'équipement de laboratoire, mais ensuite en gelant les embauches de personnel de manière significative et dangereuse.»
«On semble toujours oublier que chacun des emplois dans un cégep a sa fonction propre et que, par un effet domino, les services seront affectés. C'est tout un écosystème que le gouvernement est en train de fragiliser. Plusieurs membres du personnel de soutien nous ont témoigné leur inquiétude en nous disant que s'il devait y avoir une seule personne qui devait quitter leur service, il ne survivrait pas. Les gens sont déjà épuisés! Les coupures budgétaires, la pandémie, la pénurie de main-d'œuvre, le manque d'investissement; tout ça pèse lourd sur le système déjà affaibli», insiste Frédérique-Jade Belzile, vice-présidente aux affaires internes du SPSCÉM.
Une soixantaine de membres du personnel du collège Édouard-Montpetit, dont plusieurs étaient déguisés, se sont déplacés aux bureaux de la députée Shirley Dorismond, adjointe parlementaire du ministre responsable des Services sociaux, afin de dénoncer les coupures annoncées en éducation. (Photo: Le Courrier du Sud – Sylvain Daignault)
Coupures sévères
Dans un texte publié dans le journal syndical, Nicolas Chalifour, vice-président, information et communications au SPPCEM, dénonce la gestion budgétaire et les politiques de la Coalition avenir Québec (CAQ), qui imposent des coupes sévères dans les services publics (éducation, santé, etc.).
Ces restrictions, soutient M. Chalifour, entraînent une dégradation des infrastructures scolaires, avec des bâtiments vétustes et des ressources insuffisantes pour accueillir une population étudiante croissante.
«Selon les estimations du gouvernement lui-même, la proportion de bâtiments collégiaux jugés en « mauvais » ou « très mauvais » état serait passée de 24 % en 2019-2020 à 65 % en 2024-2025. Il va donc sans dire que la vaste majorité des travaux que les récentes coupes forcent à interrompre et à reporter sont essentiels et urgents.»
Privatisation?
Selon M. Chalifour, le gouvernement aurait créé un déficit en réduisant les impôts et en distribuant des aides financières avant les élections, justifiant ensuite des mesures d’austérité sous prétexte de «saine gestion». Cette stratégie pourrait servir à affaiblir les services publics, ouvrant la voie à la privatisation.
Il souligne que les récentes coupes ont provoqué des réactions inhabituelles : des dirigeants d’établissements scolaires et des syndicats dénoncent publiquement ces décisions. Le président sortant du Conseil d’administration, Jean-Paul Gagné, a même vivement critiqué ces coupes, affirmant qu'elles mettent en péril la mission des établissements. De même, la Fédération des cégeps adopte une position plus combative.
«En parallèle, les luttes syndicales ont permis de rappeler au gouvernement le poids des travailleurs du secteur public. Les gains obtenus renforcent la résistance face aux politiques néolibérales de la CAQ, tout en limitant l'influence de ses élus, qui voient leur popularité et leur liberté d’action restreintes», de conclure le vice-président.