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Elle maquille les visages du petit écran

le samedi 26 novembre 2022
Modifié à 14 h 55 min le 23 novembre 2022
Par Vicky Girard

vgirard@gravitemedia.com

Josée Soucy est présentement maquilleuse sur des plateaux d’émissions comme le Téléjournal, Silence on joue!, en plus de maquiller Pierre Hébert à Radio-Canada. (Photo: Gravité - Denis Germain)

Derrière le visage de personnalités publiques à la télévision ou celui de gens photographiés pour des occasions spéciales se cachent le talent et l’expertise de Josée Soucy, maquilleuse professionnelle depuis plus de 25 ans. La Sainte-Catherinoise est toujours aussi passionnée par son métier, qui vient néanmoins avec son lot de préjugés. 

«C’est un travail hors de l’ordinaire et je dirais même aigre-doux. Si je ne dis pas aux gens que je suis maquilleuse à Radio-Canada, j’ai l’impression que c’est moins pris au sérieux, moins glorieux», dit d’emblée la femme de 50 ans qui se dit fière de son choix de carrière. 

Celui-ci s’est d’ailleurs fait naturellement et rapidement. À l’école secondaire, elle était l’élève qui ne se posait pas de questions pour l’avenir. Le sien se dessinait avec des pinceaux à maquillage. 

Mme Soucy n’a pas perdu de temps pour obtenir un emploi prestigieux après avoir fait ses classes en esthétique.  

«Dès le départ, je visais les plus hauts sommets. À ce moment, l’institut Lise Watier en faisait partie. J’avais 17 ans quand je suis allée cogner à leur porte. Mme Watier était là, elle se faisait faire les ongles. Quand je l’ai vue, je suis allée la voir directement», se souvient-elle en rigolant. 

Son audace a payé. Le lendemain, on lui confirmait son embauche au téléphone. Elle y a donc fait ses premiers pas, avant de travailler à la boutique les Ailes de la mode puis d’atterrir sur des plateaux de tournage.

Évolution

Le milieu de la télévision en mouvance a aussi fait évoluer le métier de maquilleur, notamment avec l’arrivée de la haute définition. 

«Avant, on pouvait camoufler les défauts avec des fonds de teint plus épais. Avec le HD, on voit le grain de la peau, le sourcil mal épilé, ça ne pardonne pas. Il faut maquiller comme en photo, c’est très léché maintenant», détaille Mme Soucy. 

Elle adore cependant le défi que cette nouvelle réalité représente. 

En termes de produits, ils ne sont pas nécessairement plus nombreux, mais sont accessibles à tous. Toutefois, les fonds de teint adaptés à la diversité ont facilité le métier. 

«C’est une belle évolution. Avant, on devait prendre les pigments et les mélanger au fond de teint pour obtenir la bonne couleur. C’était compliqué de se souvenir de la bonne recette pour la bonne personne», raconte-t-elle. 

Mme Soucy voit son boulot comme un art et une science en constante évolution. 

«Quand la personne ouvre ses yeux et aime ce qu’elle voit, c’est ça ma paie.»

-Josée Soucy

Compétition et relation

Avec l’avènement des influenceurs qui filment entre autres des tutoriels de maquillage sur le Web et les réseaux sociaux, la compétition dans le domaine se fait fortement sentir. L’expérience fait toute la différence, selon Mme Soucy. 

«Il faut s’adapter à tous les types et couleurs de peau des autres, aux éclairages, puis opérer rapidement lors des tournages et des galas. Un maquillage de femme en télé, c'est 15 minutes. C’est ce qui différencie un professionnel d’un amateur qui apprend à se maquiller devant sa caméra», dit-elle. 

Elle admet d’ailleurs qu’elle a souvent dû reprendre le travail de certaines personnes qui n’avaient que beaucoup d’abonnés comme expérience professionnelle. 

Si elle avait un conseil à donner à ceux qui veulent sérieusement en faire carrière, ce serait de pratiquer et d’expérimenter sur beaucoup de modèles, dans toutes les palettes de couleurs. 

À l’inverse de la compétitivité, la maquilleuse souligne avoir développé de belles relations d’équipe et avec des modèles, puisqu’elle se retrouve dans leur intimité parfois quotidiennement. La discrétion est de mise lorsqu’elle accueille les confidences de célébrités en les préparant, précise Mme Soucy.

«Il y a beaucoup de glam associé au métier, mais il faut rester responsable. Les gens qui durent ne sont pas ceux qui vont dans les fêtes d’après-gala avec les artistes, qui font de la frime et qui veulent faire ce travail pour les mauvaises raisons», soulève-t-elle. 

À ses yeux, l’essentiel repose sur la confiance qu’elle donne grâce au maquillage et sur la reconnaissance qu’elle reçoit.

Horaire atypique à la pige

Il est difficile d’obtenir un emploi à temps plein ou stable dans le domaine du maquillage, fait savoir Josée Soucy. Elle-même qui a pratiqué tous les quarts de métier n’a obtenu qu’un poste permanent l’année dernière. 

«Lorsque j’ai eu mes enfants, je travaillais de nuit, cite-t-elle en exemple. Quand je reçois mes cartes de temps, il peut y avoir une journée qui commence à 7h, puis le lendemain elle commence à 14h. Il faut une bonne hygiène de vie.»

Les postes sont rares, puisque les maquilleurs sont souvent pigistes et travaillent par contrat. Il y a donc de l’incertitude pour plusieurs à chaque saison de télévision qui se termine. En parallèle, d’autres boulots sont possibles comme les mariages, les séances de photographie de mode ou d’événements divers.

Mme Soucy travaille jusqu’à 50 heures par semaine en se répétant de «ne jamais fermer de portes, puisqu’on ne sait pas ce que nous réserve demain».