Espionnage de journalistes: Coderre réfute toute ingérence

Le maire de Montréal, Denis Coderre, est venu défendre son chef de police, Philippe Pichet, à l’émission «Tout le monde en parle». Entouré de quatre journalistes qui ont été espionnés par la police, Patrick Lagacé, Monic Giroux, Félix Séguin et Marie-Maude Denis, le maire a assuré qu’il n’y avait pas d’ingérence politique dans les opérations policières.
«Mon rôle est de définir les orientations. Moi, je vous dis que je ne me mêle pas d’opérations policières à tous les niveaux, a finalement laissé tomber le maire, après plusieurs questions du journaliste Patrick Lagacé. Il faut protéger la liberté de presse et les sources. S’il y a une chasse aux sorcières, ce n’est pas acceptable. Je refuse l’espionnage.»
Le maire a réitéré sa confiance envers le directeur du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM), Philippe Pichet, se disant contre les exécutions de sommaires. «Je comprends très bien les émotions. C’est fragile la démocratie, et il faut la protéger», a-t-il dit. Selon M. Coderre, les policiers ont un devoir de réserve puisqu’ils travaillent avec des informations sensibles.
Avant l’entrevue avec le maire, les journalistes Patrick Lagacé, Monic Néron, Félix Séguin et Marie-Maude Denis avaient expliqué leur vision du scandale de consultation de leurs registres téléphoniques afin de trouver l’origine de fuites dans le corps policier.
«On cherche ultimement qui nous parle. Le but est de les faire taire, ce qui ne sert ni l’intérêt public, ni quoi que ce soit, a lancé la journaliste au 98,5 FM, Monic Néron. On met plus d’énergie à trouver qui parle aux journalistes qu’à trouver les criminels.»
Cette façon de faire, est carrément dangereuse a dénoncé Félix Séguin, journaliste à TVA. «C’est mettre la vie en danger de certaines sources. Les journalistes, ça parle à la police et ça parle aux bandits», a-t-il rappelé.
La journaliste à l’émission Enquête, Marie-Maude Denis, s’est dite offusquée que le téléphone de son conjoint, Éric Thibault, ait aussi été scruté. «Je pense que si notre fils de trois ans avait eu un cellulaire, il aurait été espionné», a-t-elle ironisé.
En plus de se vider le coeur, le quatuor de journalistes a déploré que les policiers essaient toujours de connaître leurs sources. Patrick Lagacé a raconté avoir été rencontré par deux enquêteurs de la Sureté du Québec (SQ) qui voulaient savoir qui avait ébruité des informations sur l’agent du SPVM, Ian Davidson, qui aurait vendu une liste d’informateurs à la mafia. «Ils m’ont dit: “On sait à qui tu parles. Dis-nous qui c’est, on sait que c’est une bonne personne”», a relaté le journaliste. Les policiers auraient même prétendu qu’il avait cherché des informations pour un reportage de Félix Séguin, un journaliste qui oeuvre pour un compétiteur. «S’ils ont présenté ça à la juge, c’est du banditisme, c’est faux, s’est-il offusqué. Ces cr***** là, en plus de nous espionner, ils font circuler des affaires qui sont fausses.»
M. Lagacé a dénoncé le fait que des mandats sont parfois obtenus à partir de fausses informations. Des policiers vont chercher les moyens que tu peux faire dans une enquête criminelle, puis à la fin c’est magique, il n’y a pas d’accusations, a-t-il signalé. Si tu ne déposes pas d’accusation, tu n’auras jamais à dévoiler tes motifs. C’est le meilleur moyen d’espionner des gens sans jamais qu’on sache ce que tu fais avec ces informations.»
Dominique Cambron-Goulet - Métro