Culture
post-format-video

Jean-Marc Phaneuf : nouveau média, même regard aiguisé sur l’actualité

le vendredi 29 novembre 2019
Modifié à 11 h 49 min le 29 novembre 2019
Par Ali Dostie

adostie@gravitemedia.com

https://www.dailymotion.com/video/x7olxpa L’ancien caricaturiste du Courrier du Sud Jean-Marc Phaneuf est très heureux de revenir à ses «anciens amours»... la caricature, au quotidien. Depuis deux mois, il publie chaque jour un nouveau coup de crayon sur son site www.vraismoutons.com et sa page Facebook. «Ça fait longtemps que je voulais en faire de cette façon, de suivre l’actualité et dessiner chaque jour», témoigne d’entrée de jeu Jean-Marc Phaneuf. En plus des caricatures, il crée une bande dessinée à la vision davantage sociale, qu’il publie le dimanche, en guise de tour d’horizon de la semaine. Un contexte où il ne se donne aucune contrainte – hormis celle qu’il s’est imposé tout au long de sa carrière: éviter les attaques sur la vie personnelle de ceux dont il dresse le portrait. Cette liberté lui permet de dépeindre les nouvelles qu’il souhaite, alors que dans un journal – il a exercé comme caricaturiste au Devoir, au journal Les Affaires, puis au Courrier du Sud, entre autres – il fallait cibler « la » grosse nouvelle du jour. Le journal hebdomadaire engendrait aussi la contrainte de l’angle local. Et quand un sujet «faisait les nouvelles», six caricaturistes pouvaient s’exprimer avant que sa caricature ne soit publiée. «Si une journée, j’ai pu faire un dessin en avant des autres journaux, je suis content de moi», admet-il. Phaneuf rappelle le fil de fer sur lequel marche les caricaturistes, risquant d’être accusé de plagiat s’ils dépeignent d’une façon semblable à celle d’un collègue d’un autre média une nouvelle de l’heure ou une personnalité publique. «Si un matin, le Devoir et La Presse faisaient la même caricature, on criait au génie. Si l’un d’eux l’avait sorti la veille, on aurait dit que c’est du plagiat, même si dans les faits, on n’avait pas vu la caricature de l’autre.» Des moutons, pour faire différent Le site vraismoutons.com porte bien son nom. Tous les personnages des caricatures que crée Phaneuf sont... des moutons. À ses yeux, cet animal représente bien l’être humain, tant son côté «suiveux», docile et exploité que son côté, parfois, exploitant. «La race humaine passe par la bergerie, image-t-il. Ça crée un autre univers, et ça dépeint nos comportements sociaux. On va chercher un deuxième niveau et parfois même, je l’espère, un troisième niveau.» Avec la technologie Cumulant plus de 30 années de métier, Jean-Marc Phaneuf reconnaît que la technologie a considérablement transformé les méthodes de travail de sa profession. À ses débuts, il dessinait tout «au trait», au crayon feutre. Une caricature pouvait naître en 20 minutes ou 90 minutes. Puis est apparue la couleur. «J’ai sauté à pieds joints là-dedans! lance-t-il. C’est plus long, mais j’adore ça.» Aujourd’hui, ses dessins prennent toujours forme sur papier, mais l’outil Photoshop s’est imposé, en multipliant les techniques et possibilités. Par contre... Photoshop ne doit pas devenir «ta facture» ou «ton style». «Sinon, tu ressembles à tout le monde», juge le caricaturiste. Le pouls du public [caption id="attachment_82802" align="alignright" width="444"] Cette caricature a franchi le cap des 8300 personnes atteintes sur Facebook.[/caption] Jean-Marc Phaneuf le constate, avec un site Web et sa page Facebook «Caricaturiste Phaneuf» vient une plus grande proximité avec le public. À moins qu’une caricature ait choqué ou sorti tout particulièrement du lot, les commentaires se faisaient plutôt rare, du temps qu’il publiait dans des journaux. «J’aime beaucoup avoir ce feedback, ce contact direct». À cette époque où les médias sociaux peuvent souvent s’enflammer en un rien de temps, Phaneuf constate tout de même que les gens ont un esprit critique développé et acceptent les critiques plus acerbes. «Oui, le piton est plus facile pour être offusqué, mais sur Facebook, certains vont répondre. Je laisse ça aller. Ça titille le côté sensible des opinions, ça suscite des discussions.» Autre avantage de la page Facebook: le caricaturiste sait quand une des œuvres fait mouche. L’une de ses caricatures, opposant le casino et le système de santé, a d’ailleurs franchi les 8300 personnes atteintes, le tout, avec (déjà) 1400 abonnés. Il inscrit d’ailleurs les performances de ses publications sous les caricatures. Ce «pouls de l’auditoire» devient une source de motivation. Phaneuf publie aussi d’anciennes caricatures qui, en raison de l’actualité, méritent leur place dans son fil. «Quand je sais que je ne peux pas faire mieux pour parler d’une nouvelle, je mets une caricature passée.» Une tonne d’archives En plus de ses nouvelles créations, le site Web recense une bonne partie des caricatures qu’il a conçues en carrière, plus de 1700 sur plus de 6000. Elles sont classées en catégories qui respectent la thématique du site : vieux moutons, vrais moutons on encore télé-moutons. « La catégorie vieux moutons, c’est un peu comme un micro dictionnaire de personnages cognitifs qui ont influencé le Québec moderne.» Peut-être trouvera-t-on un jour un certain Phaneuf dans cette banque de personnages.