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La rivière Richelieu : du soldat au touriste

le lundi 20 mai 2024
Modifié à 15 h 55 min le 24 mai 2024

Bartlett, William Henry, Fort Chambly, gravure, Londres, Geo. Virtue, 1840. https://collections.banq.qc.ca/ark:/52327/1996263

Dans le rétroviseur

Par Michèle Lefebvre, bibliothécaire à BAnQ

Pour la plupart d’entre nous, la rivière Richelieu est associée aux excursions de fin de semaine… et aux occasionnelles inondations de printemps. Et pourtant, elle a longtemps constitué l’une des voies de communication les plus importantes de l’est de l’Amérique du Nord. Cette rivière de quelque 125 kilomètres, ponctuée de nombreuses îles, se jette au nord dans le fleuve Saint-Laurent, vis-à-vis de Sorel, après avoir pris sa source, au sud, dans le lac Champlain. À proximité de ce dernier coule la rivière Hudson, qui descend jusqu’à New York. 

Avant l’arrivée des Européens sur le continent, des Autochtones vivent sur ses berges. Lorsque Samuel de Champlain débarque au début des années 1600, la guerre fait rage entre les Hurons, les Algonquins et les Innus d’une part, et les Iroquois d’autre part. Ces derniers ont été repoussés au sud de la rivière Richelieu, qu’on appelle alors la rivière des Iroquois. La décision de Champlain de remonter la rivière avec les premiers pour attaquer les seconds va faire des Français les ennemis jurés des Iroquois, futurs alliés des Anglais.

Passage stratégique entre la Nouvelle-France et la Nouvelle-Angleterre, la rivière Richelieu devient pendant deux siècles le théâtre de multiples batailles et escarmouches. En 1665, le roi de France y expédie le régiment Carignan-Salières pour construire une série de forts le long du Richelieu. Plusieurs des soldats du régiment s’installent ensuite dans la colonie, contribuant à sa survie. Deux d’entre eux laissent leur nom aux forts qu’ils font construire : Sorel et Chambly. C’est le début de la fortification du cours d’eau.

L’ultime affrontement de la guerre de la Conquête, qui mène à la reddition de la colonie française aux mains des Anglais en 1760, se déroule sur la rivière Richelieu, à l’île aux Noix, près de l’actuelle frontière des États-Unis. En 1775, les révolutionnaires américains empruntent cette même rivière pour tenter de s’emparer du Québec. Après un long siège, Saint-Jean capitule, ouvrant la porte vers Montréal où les révolutionnaires passent l’hiver. C’est aussi le long du Richelieu que le mouvement patriote fait le plus d’adeptes et qu’ont lieu quelques-unes des batailles les plus iconiques de la rébellion de 1837, à Saint-Denis, seule victoire patriote, et à Saint-Charles.

Bellin, Jacques Nicolas, Carte de la rivière de Richelieu et du lac Champlain, Paris, s. é., 1744.
https://collections.banq.qc.ca/ark:/52327/2244778
 

Quand cessent les affrontements entre Canadiens et Américains, après la guerre anglo-américaine de 1812-1815, la rivière se transforme en voie d’entrée royale pour une nouvelle sorte d’envahisseurs, les touristes ! En effet, dès 1825, des guides touristiques américains incluent le Québec dans leurs circuits de plaisance. Les touristes du sud y arrivent de la même manière que les soldats : après un voyage en bateau jusqu’à Saint-Jean, ils poursuivent leur route en voitures à chevaux le long des berges jusqu’à Chambly afin d’admirer la silhouette du fort, puis ils bifurquent vers Montréal via Longueuil.

Entre nous, la rivière Richelieu est quand même plus belle lorsqu’elle sert le plaisir plutôt que la guerre…

Beauclerk, Charles, Traversée de la rivière Richelieu la nuit [par l’armée britannique pendant la rébellion de 1837], gravure, Londres, A. Flint, 1840. https://numerique.banq.qc.ca/patrimoine/details/52327/3287531

Bartlett, William Henry, St John's – Richelieu River [Saint-Jean face à la rivière Richelieu], gravure, 
https://collections.banq.qc.ca/ark:/52327/1996254

 
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