Culture

Le bonheur de retrouver cette Nana à tous…

le mercredi 29 mars 2017
Modifié à 0 h 00 min le 29 mars 2017
Par Ali Dostie

adostie@gravitemedia.com

THÉÂTRE. La relation mère-fils présentée dans Encore une fois si vous permettez est éminemment personnelle. Avec cette œuvre écrite en 1998, l'auteur Michel Tremblay rend hommage à sa mère, son incontournable muse. Le public s'y reconnaît pourtant sans peine, à travers les anecdotes de la tante Gertrude et son tordeur à linge ou de rôti de bœuf pas assez cuit, à travers les discussions sur la littérature, le quotidien... et la mort.

Sur scène, Guylaine Tremblay fera vivre la grandiloquente Nana, et Henri Chassé, le narrateur. La production présentée chez Duceppe au printemps 2016 terminera sa première tournée au Théâtre de la Ville, du 30 mars au 1er avril.

Pour Henri Chassé, Encore une fois si vous permettez est – entre autres – une pièce immensément comique. «Les vingt dernières minutes sont très touchantes. Mais tout le reste est extrêmement drôle, notamment sur les habitudes des familles, raconte-t-il. Ça rit énormément dans la salle, on n'est jaloux d'aucun show d'humoriste!»

Une caractéristique qui s'explique par la redoutable efficacité du texte et le sens du «delivery» de l'auteur, croit le comédien, qui a déjà joué les mots de Tremblay dans Bonjour, là, bonjour et Le vrai monde ?.

«C'est bien important pour moi de jouer du Tremblay, ç'a été un de mes premiers rêves d'acteurs, se souvient Henri Chassé. Il est notre Tchekhov, tant par la quantité que l'importance de son œuvre.»

Tout est dans le texte

Si Guylaine Tremblay a dû se distancer à la fois de la mémorable interprétation de Rita Lafontaine et de la mère du célèbre dramaturge pour créer «sa» Nana, il en est de même pour Henri Chassé.

Ce narrateur n'est ni Tremblay, ni même le «petit Michel» que l'on retrouve entre autres dans Bonbons assortis et, plus récemment, Conversations avec un enfant curieux.

«Ça semble simple à dire, mais je me suis inspiré du texte. Des fois, pour certains auteurs, on a besoin d'aller chercher ailleurs, parce que les informations sont plus diffuses. Mais dans ce cas, même si on a une très grande liberté, tout se trouve dans le texte», explique Henri Chassé, par rapport à ce rôle qui a déjà été tenu par le metteur en scène André Brassard.

Face à la démesure de Nana, le personnage du narrateur est plus effacé, à tout le moins plus observateur. «Au début, quand je l'ai lu, j'avais une certaine crainte. Le personnage semblait un peu le faire valoir.  Avec le metteur en scène Michel Poirier, on l'a abordé différemment. Le narrateur est celui qui convoque la mère, il la présente au public. Il la fait revenir.»

Omniprésente dans l'œuvre de Tremblay, sa mère n'a jamais connu les pièces, les romans et le succès de son fils. Les Belles-Soeurs a été jouée pour la première fois en 1968, deux ans après sa mort. «Il a voulu lui redonner ça, relate Henri Chassé. Et surtout, lui offrir une sortie digne d'elle.»

Pourtant, cette maman est présentée dès le départ comme une femme simple, que tous reconnaîtront. Henri Chassé cite son personnage qui dit de Nana qu'elle «est née à une époque précise de notre pays, elle évolue dans une ville qui nous ressemble, c'est vrai, mais, j'en suis convaincu, elle est multiple. Et universelle».

«C'est une des choses que l'on reconnaît à Tremblay, pour qui la meilleure façon d'être universel est de parler de soi, de la cellule familiale, rappelle le comédien. C'est tout le talent de l'auteur. De faire quelque chose de très personnel, sans être narcissique. Et de réussir à toucher tout le monde.»