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Nourrir les animaux sauvages : d’apparence banal, en réalité nocif

Il y a 3 heures
Modifié à 11 h 46 min le 15 août 2025
Par Ali Dostie

adostie@gravitemedia.com

Le pain peut causer une malformation des ailes chez le canard. (Photo : Le Courrier du Sud –Ali Dostie)

Bien qu’il vienne d’une bonne intention, le simple geste de donner quelques miettes à un canard qui se balade autour des lacs du parc Michel-Chartrand, ou de laisser au sol quelques graines destinées à des oiseaux est nocif tant pour la santé des animaux que pour l’équilibre écologique des parcs-nature. Par le biais d’une campagne de sensibilisation, la Ville de Longueuil s’attaque à cet enjeu.

La réglementation municipale interdit de nourrir les animaux dans les parcs-nature de Longueuil. Des affichettes le rappellent un peu partout dans les parcs. Malgré tout, bien des citoyens cèdent à la tentation de nourrir différentes espèces telles que les cerfs, les écureuils, les bernaches, les ratons-laveurs. 

Coordonnateur de projet aux parcs-nature, Mihai Raduca cible trois impacts majeurs que cause le nourrissage des animaux sauvages, dont les répercussions sur la santé des animaux. 

«On peut les rendre malades, on peut causer leur mort, indique-t-il. Si on donne trop de pain à un canard, à la longue, il peut développer une malformation, appelée aile d’ange. Le trop gros apport en glucides déforme ses ailes, et ça fait en sorte qu’il ne peut plus voler.»

De plus, les régimes alimentaires des animaux, qui évoluent au gré des saisons, ne sont pas pris en compte lorsque des aliments leur sont donnés par des humains. Si les cerfs se nourrissent de feuillus l’été, ils vont l’hiver dans des «ravages», où ils se nourrissent de conifères. 

Mihai Raduca, coordonnateur de projets aux parcs-natures (Photo : Le Courrier du Sud - Guillaume Gervais)

Dépendance

M. Raduca assure aussi que les parcs-nature offre aux animaux de la nourriture en quantité suffisamment abondante pour sustenter leur appétit. «Ils ont les capacités nécessaires pour trouver de la nourriture, affirme-t-il. On leur fait plus de mal en les rendant dépendants des humains.»

Car voilà l’un des autres impacts du nourrissage d’animaux sauvages : ils deviennent dépendants de cette source de nourriture et perdent l’habitude d’aller en chercher par eux-mêmes.


Des cerfs, habitués à la présence des visiteurs au parc Michel-Chartrand. (Photo : Le Courrier du Sud – archives)

Mihai Raduca soulève aussi que la nourriture laissée par exemple pour nourrir un cerf attirera forcément d’autres espèces. «Si on met de la nourriture et qu’on attire une panoplie d’espèces, il y a un risque de propagation des maladies à travers ces animaux qui cohabitent à un endroit précis où ils n’auraient pas cohabité normalement.»

Des cas de rage sont réapparus en Montérégie, depuis l’an dernier. Cela faisait une dizaine d’années que des cas avaient été recensés. 

Changements de comportements

Les changements comportementaux chez les animaux constituent enfin le troisième impact majeur du nourrissage par les humains. 

Nourrir des canards et bernaches à l’année peut changer leurs habitudes migratoires, et les bernaches peuvent devenir plus agressives au contact des humains. 

Par ailleurs, la biodiversité des parcs se retrouve aussi affectée par le nourrissage d’animaux sauvages, car il peut entraîner une surpopulation de certaines espèces. 

«Avec le cerf, on le voit : il n’y a pas de régénération du sous-bois. On a des enjeux de pérennité et de régénération des peuplements forestiers», soutient M. Haduca.

Des exclos sont aménagés depuis quelques temps déjà autour de zones de régénération et autour de jeunes arbres fraîchement plantés, afin de pallier le problème de surbroutage par la population de cerfs.  Les lapins ont aussi mangé les pousses d’une microforêt près du Relais.

Méthode douce

Bien que le règlement municipal permette d’émettre des constats d’infraction à un citoyen qui nourrit un animal sauvage, la Ville opte plutôt pour la méthode douce.

Des cadets seront d’ailleurs présents dans les parcs, dans une approche de sensibilisation. 

En collaboration avec un organisme de conservation, des patrouilles seront implantées dans les parcs-nature afin d’expliquer ce qui est problématique dans le geste d’apparence banale de nourrir les animaux sauvages.

À lire aussi : Parcs en santé : connaître les déplacements des cerfs grâce à des colliers GPS
 

 

Gestion de la population de bernaches

La Ville de Longueuil mène depuis quelques années une opération de gestion de la population de bernaches, présentes en très grand nombre au parc Michel-Chartrand. 

Au printemps, les œufs sont stérilisés pour empêcher de nouvelles naissances. À l’automne, on effarouche les bernaches pour les faire fuir le territoire où elles posent problèmes. 

«On ne peut pas intervenir l’été car c’est la période de mue. Durant la nidification et l’élevage des jeunes, les adultes muent et ne peuvent pas voler», détaille Mihai Raduca.

Les effaroucher empêche aussi le recrutement de bernaches qui descendent du grand Nord, qui seraient tentées de se poser si elles voient une forte présence de leurs semblables.

Si les effets nocifs des bernaches sur les autres espèces aviaires sont peu documentés, il demeure que c’est une espèce très agressive, protectrice de son nid. Le principal effet nocif est la cohabitation avec l’humain, en raison de la grande quantité d’excréments, sur le gazon. 

 

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