Opinion
Tribune libre

Opinion - Publisac joue à la victime

le vendredi 05 février 2021
Modifié à 14 h 28 min le 05 février 2021

Cette semaine, l’industrie des pâtes et papier s’est élevée en faux contre une phrase que Martin Matte a lancée au sujet des circulaires lors de son passage à l’émission Tout le monde en parle, comme quoi il est insensé « de couper des arbres quand les gens ont juste à aller voir sur Internet » (Le Courrier du Sud, 3 février). Publisac, de son côté, a même inséré un encart dans ses sacs pour taper sur le même clou. Mais que se cache-t-il vraiment derrière cette levée de boucliers? Tout d’abord, il est fallacieux d’affirmer qu’« aucun arbre n’est coupé pour fabriquer des circulaires » alors que, selon le propre argumentaire de l’industrie, « 35 % » de chaque tronc est transformé en papier, contre « 45 % » pour le bois d’œuvre. Quand il y a si peu d’écart entre les deux types d’utilisation, on ne peut prétendre que le papier est tiré de simples « résidus » et que cela ne contribue pas aux raisons pour lesquelles les arbres sont abattus. De toute façon, ce n’est là que de la poudre aux yeux, car au bout du compte, le véritable problème lié aux circulaires est ailleurs. Vu que les 100 000 tonnes annuelles de circulaires sont emballées dans 182 millions de sacs de plastique, le tout est impossible à recycler tant que les deux matières n’ont pas été séparées, ce que les centres de tri débordés n’arrivent pas à faire. Truffés de plastique, les ballots de papier destinés au recyclage sont irrécupérables, et finissent par être enfouis. Pis encore : il est aberrant de distribuer massivement des circulaires à des citoyens qui, pour la plupart, n’ont rien demandé de tel — et ce, au beau milieu de la présente crise environnementale (oui, oui, la planète est toujours en péril, même si la Covid a quelque peu détourné notre attention). C’est d’ailleurs là l’essence de l’absurdité que les papetières tentent de faire oublier avec leurs histoires de copeaux : vu que 96 Canadiens sur 100 ont accès aux circulaires en ligne, le règne de leur version papier est révolu. Si Publisac et ses alliés investissent tant d’efforts pour critiquer les propos de Martin Matte, c’est parce que le virage numérique qu’il prône va affecter leurs profits, point à la ligne. Ne laissons pas une considération aussi crasse entraver la marche du rééquilibre écologique. Charles Montpetit