Culture
Premier recueil de nouvelles d’Anne Genest: ces multitudes de solitudes
le mercredi 21 novembre 2018
Modifié à 15 h 03 min le 21 novembre 2018

LITTÉRATURE. Les papillons boivent les larmes de la solitude est le premier recueil de nouvelles de l’auteure Anne Genest. La solitude n’y a pas qu’un revers négatif. Car l’auteure s’y abreuve pour écrire.
L’étranger croisé à l’épicerie, le quidam dans la rue ou encore la dame à la librairie… pourquoi sont-ils seuls? C’est leur histoire que s’est imaginée Anne Genest et qu’elle a couchée sur papier dans son recueil.
«La solitude, c’est si beau. On est dans une période où on est tout le temps connecté. Le solitude n’est plus vraiment là, on est sollicité de toutes parts», évoque l’auteure de Longueuil.
Voilà une raison de plus pour se pencher sur cette denrée qui se fait de plus en plus rare. Quoique, ne sommes-nous pas un peu seuls lorsque rivés au bout d’un cellulaire? Autre débat.
L’étincelle de départ de ses histoires peut aussi être l’un des objets qu’elle trouve ici et là, et qu’elle conserve dans son sac. Un petit sapin de carton, une clé ou un soulier sont autant de pistes d’inspiration.
Dans un procédé similaire, Anne Genest cumule dans un cahier nombre de citations qu’elle récolte au fil de ses lectures, pour «contaminer son imagination». Chacune des nouvelles est surmontée d’une phrase en exergue, une citation laissée là pour inspirer le lecteur.
La solitude de l’écrivain
Ce livre a pris forme au fil du temps, s’est écrit à temps perdu… ce qui manque parfois dans l’horaire d’une jeune maman. Mais cette solitude qui a été point de départ de l’écriture est aussi bien accueillie comme mode de vie.
«Avec un bébé, on croit qu’il faut beaucoup de temps pour écrire. Mais la solitude, j’ai réussi à lui faire de la place dans ma vie… en me levant tôt, dès 4h! Comme ça, j’ai deux ou trois heures devant moi. J’adore ces moments où je suis seule debout et que tout le monde est couché. On dirait que le soleil se lève juste pour moi.»
«Écrire, c’est un besoin, ça n’a juste pas d’allure», poursuit celle qui a fait paraître des textes dans diverses revues et qui s’est adonnée à l’aventure d’un blogue.
Cet amour de l’écriture remonte à l’enfance, alors qu’elle écrivait des histoires sur des feuilles de papier qu’elle brochait et glissait sous la porte du bureau de son père. Aujourd’hui, ces carnets remplissent encore ses bibliothèques.
«Mon père était libraire, ma mère, peintre. On avait chacun notre façon de nous exprimer», résume-t-elle.
Elle évoque la librairie de livres usagers de son père. «C’était minuscule. Tu entrais là et tu avais peur qu’un livre te tombe dessus, relate-elle en riant. Il gardait tout. Pour lui, et pour moi, un livre, c’est trop précieux, on ne peut pas jeter ça!»
Transmettre
Bibliothécaire en milieu scolaire, Anne Genest s’affaire aussi à transmettre cette passion de la lecture et de l’écriture, convaincue que plus on dévore de livres, plus l’appétit pour l’écriture viendra.
Elle a aussi mis en place un club de création littéraire, où les élèves sont appelés à laisser libre cours à leur imagination, sans contraintes.
«Je veux leur donner la base, leur montrer l’écriture automatique. Je leur dis: vous pouvez écrire ce que vous voulez, je ne regarderai même pas les fautes. J’ai l’impression que ça leur fait du bien. De leur enlever les ornières de la grammaire, ça libère quelque chose.»
Roman
À peine le recueil de nouvelles publié, Anne Genest planche déjà sur l’écriture d’un premier roman, qui pourrait voir le jour d’ici l’an prochain.
Le roman d’autofiction traitera de fertilité – sur plusieurs plans – en établissant des parallèles entre le passé et le présent.
Le roman ne mettra pas en scène l’histoire d’Anne Genest, mais s’inspirera de son parcours, de son enfance à la campagne, avec des parents «artistes et bohèmes, où tout était possible», jusqu’à sa vie d’aujourd’hui, en milieu urbain.
L’idée de la fertilité passe de cette certitude, enfant, qu’elle serait un jour maman, aux contraintes de la réalité, alors qu’Anne Genest a dû passer par la fécondation in vitro, un processus de neuf ans.
«C’est une histoire sur le choc entre les rêves et la réalité», conclut-elle.