S'accomplir dans le milieu policier

Claudine Després, dans son bureau au poste du boul. Curé-Poirier. (Photo: Le Courrier du Sud ‒ Denis Germain)
À l’Institut de police de Québec, Claudine Després a fait partie de la première cohorte comptant autant de futurs policiers que de futures policières à l’aube des années 2000. Elle a ensuite fait son chemin au Service de police de l’agglomération de Longueuil (SPAL) qui, aujourd’hui, figure parmi les corps de police comptant la plus grande proportion de policières.
En une vingtaine d’années, Mme Després a gravi les échelons jusqu’au grade de capitaine. En date du 1er janvier 2022, on comptait 7 femmes et 25 hommes chez les cadres du SPAL. Une ascension acquise au prix d’efforts supplémentaires en tant que femme?
«Peut-être que des filles diraient que c’est plus difficile, mais je ne l’ai jamais senti. J’ai été dans l’armée, j’ai travaillé comme agent de sécurité, j’ai souvent été dans des milieux de gars», répond-elle.
«Je n’ai jamais joué à la tough, j’ai toujours respecté qui j’étais, mes forces et mes faiblesses.»
-La capitaine Claudine Després
«Je sais que ce n’est pas la réalité pour toutes, que certaines ont eu la vie plus dure», ajoute-t-elle.
Cela dit, la capitaine admet qu’il est mieux d’avoir la couenne dure pour travailler dans le milieu policier.
«Au niveau caractère, il faut que tu sois capable de mettre tes limites parce que c’est sûr que des gars qui vont t’essayer! Certains vont passer des commentaires… Ce n’est pas nécessairement toujours gentil, et ça n’a pas nécessairement toujours de la classe! Mais à quelque part, il faut être capable de doser, de relativiser, sans accepter l’inacceptable.»
Depuis son entrée au SPAL, les choses n’ont pas tant changé, selon Claudine Després: les remarques sexistes, qui ne viennent pas forcément des policiers plus âgés, demeurent néanmoins une minorité.
«Si tu parlais à des policières qui ont une trentaine d’années de service, ce serait sans doute différent… Mais il y avait déjà des pionnières qui avaient tapé le chemin avant moi», se réjouit-elle.
«Ben là, ils nous envoient deux filles.»
Dans les relations avec les citoyens, c’est surtout lors d’appels d’urgence que surviennent les jugements ou craintes à l’égard de la capacité des policières à accomplir leur travail.
Claudine Després raconte être intervenue, avec une collègue, pour calmer une chicane de famille. L’adolescent, retenu par ses frères, était en crise.
«Quand on est arrivées, la mère a dit: «"Ben là ils nous envoient deux filles". Le jeune, on le connaissait. On a tout de suite entretenu un dialogue qui a fait baisser la tension, relate-t-elle. On utilise des techniques différentes parfois. Mais selon la situation, il faut intervenir physiquement et, donc, être en mesure de le faire.»
Une organisation, plusieurs métiers
Il est étonnant de constater à quel point le parcours de Claudine Després au sein du SPAL est diversifié.
En début de carrière à Saint-Bruno-de-Montarville, elle a choisi la patrouille.
La fusion des services de police de l’agglomération en 2002 a créé de nombreuses ouvertures de postes, ce qui a menée l’agente à l’identité judicaire. De retour de son congé de maternité, elle a opté pour un poste en prévention comme policière communautaire. Six ans plus tard, elle a remporté le concours de sergente, puis est retournée à la surveillance du territoire.
«Ça m’a ramené à mes anciennes amours!» lance-t-elle.
Ce retour sur le terrain en avait tout de même étonné certains. «Je partais d’un poste de jour, la semaine, pour retourner à la patrouille, avec une rotation de jour, soir et nuit… C’est sûr qu’il y a des gens qui m’ont dit: "T’es folle!"»
Par la suite, elle a obtenu le grade de capitaine. Elle œuvre au service des communications depuis deux ans, mais pas pour longtemps. «Je vais retourner à la surveillance du territoire, pour continuer à me développer en tant que gestionnaire», explique-t-elle.
«Dans la police, on a la possibilité de faire tellement de choses. Tu n’es pas obligée d’être tannée de travailler à un endroit pour partir! Tu as l’opportunité, tu vas l’essayer. C’est ce que je trouve merveilleux.»
Ce qui lui fait dire que malgré les quelques creux de vagues et réflexions, renoncer à l’uniforme n’a pas été envisagé. «Sortir de la police? jamais!» dit-elle.
Le SPAL en tête de liste au pays
Le SPAL est l’organisation comptant la plus forte proportion de policières au Canada parmi les corps policiers desservant une population de 100 000 habitants et plus, selon les plus récentes données de Statistique Canada.
En 2019, la proportion de policières du SPAL atteint les 35%, devant les services de police de Montréal (33%) et de Laval (31%). À titre comparatif, le Service de police de Toronto compte 19% de policières.
En date du 1er janvier 2022, 212 policières et 425 policiers travaillent au SPAL, soit une proportion de 33% de femmes.