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Superhéros auprès des itinérants à Montréal

le jeudi 18 mars 2021
Modifié à 10 h 34 min le 18 mars 2021
Par Katherine Harvey-Pinard

kharvey-pinard@gravitemedia.com

Des intervenants de la Maison Kekpart, à Longueuil, sont dépêchés à la halte chaleur du Square Cabot, à Montréal, depuis la mi-février. Sur place jusqu’à la fin mars, ils apportent un soutien aux sans-abri venus se réchauffer, manger, boire et dormir en sécurité. L’un des intervenants, le Longueuillois Raphael Beaulieu, a accepté de parler de son expérience au Courrier du Sud. «C’est important d’avoir des intervenants qui peuvent avoir des conversations avec eux et qui sont là régulièrement pour créer un lien de confiance», explique celui qui a passé deux semaines à la halte chaleur en février. L’homme de 25 ans discutait avec les itinérants et les écoutait. Il leur distribuait de la nourriture, du café et des vêtements donnés par un organisme du coin, Résilience Montréal. La halte chaleur peut accueillir jusqu’à 15 personnes pendant le couvre-feu, de 20h à 5h, afin de respecter les règles sanitaires. C’est une initiative du Foyer pour femmes autochtones réalisée à la suite du décès, en janvier, d’un Innu de 51 ans dans une toilette chimique à Montréal. L’itinérant Raphael André s’y était réfugié pour éviter de recevoir une contravention pendant le couvre-feu. «C’est vraiment un endroit de sécurité pour eux, ils en ont besoin», relève l’intervenant. Être un superhéros Raphaël Beaulieu est un intervenant et éducateur spécialisé à la Maison Kekpart. Il respire la bonté. Il le dit lui-même: il a toujours voulu aider les gens. «Je voulais être un superhéros, mais on ne peut pas. Donc, j’ai trouvé une alternative qui est d’aider les gens psychologiquement», dit-il. Il s’est tout de suite senti interpellé quand il a appris que des intervenants de la Maison Kekpart iraient prêter main-forte au Square Cabot. «Les sans-abris, malheureusement, les gens ne les aiment pas à Montréal, note-t-il. Beaucoup vont les éviter, ne pas les regarder. Le contact humain, je pense que c’est la chose la plus importante. Juste leur faire un sourire, leur répondre, ça aide déjà.» Il s’est senti utile. «Avec la COVID, il y a tellement d’organismes qui ferment leurs portes parce qu’ils n’ont pas suffisamment d’employés ou parce que c’est difficile avec le côté sanitaire. Les sans-abris se retrouvent sans ressources pour les aider», déplore-t-il. Comprendre Pendant ses deux semaines à Montréal, le Longueuillois a été témoin de situations malheureuses qu’il n’est pas près d’oublier. «J’ai rencontré une personne qui était en train de perdre ses orteils en raison du froid, exemplifie-t-il. C’est assez difficile. Ce sont des personnes qui n’ont pas de carte d’assurance-maladie, de moyen d’aller chercher de l’aide. Le plus qu’on pouvait faire, c’était de mettre de la vaseline, de réduire la douleur de la personne.» Il a également rencontré un ancien combattant de l’armée canadienne. «Quand il est revenu, il n’avait plus rien, raconte-t-il. Il n’avait personne pour l’aider et il était incapable de se réinsérer dans la société. Donc, malheureusement, il s’est retrouvé dans la rue. Ce que je trouvais vraiment désolant, c’est qu’il s’est battu pour notre pays. C’était pour le bien, pour aider.» M. Beaulieu rappelle qu’il est important de prêter l’oreille aux itinérants. «J’aime souvent dire que, par moment, on va écouter les gens pour répondre, mais pas pour comprendre, dit-il. Je pense que c’est important de comprendre la personne avant de vouloir régler le problème ou de faire une action.»
«C’est important de se mettre à la place de la personne pour comprendre comment elle peut se sentir.» -Raphaël Beaulieu
Financement Financée par le ministère des Affaires autochtones, la halte chaleur a été mise en place à la demande du ministre Ian Lafrenière, en janvier. Il visait ce secteur puisqu’«il s’agit d’un endroit névralgique à Montréal et un lieu de rassemblement important pour la clientèle itinérante», fait savoir son attaché de presse, Mathieu Durocher. La halte a été mise en place en collaboration avec les nations Mohawk et Innue et la Ville de Montréal. Raphael Beaulieu rappelle pour sa part que cette initiative du Foyer pour femmes autochtones a vu le jour après le décès, en janvier, de Raphael André, un sans-abri qui s’était caché dans une toilette chimique afin d’éviter de recevoir une contravention pendant le couvre-feu. L’Innu de 51 ans est mort de froid. Ludivine Reding La Maison Kekpart, qui célèbre ses 40 ans, a récemment annoncé que la comédienne Ludivine Reding agira comme porte-parole pour sa campagne de financement 2021-2022. Rappelons que toutes les semaines, 300 jeunes fréquentent les programmes de l’organisme. Chaque année, 4 000 jeunes bénéficient des services d’écoute, d’accompagnement et de support des professionnels. «En collaborant avec nous, Ludivine nous accorde un grand privilège. Je la remercie chaleureusement de participer à la réalisation des rêves de nos jeunes!» lance le directeur général de la Maison Kekpart, Richard Desjardins, par voie de communiqué.