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Santé

Une vocation faite d’écoute et de transmission pour la médecin de famille de l’année

le vendredi 16 août 2019
Modifié à 13 h 23 min le 06 novembre 2019
Par Ali Dostie

adostie@gravitemedia.com

Accompagner des résidents qui éprouvent plus de difficultés afin qu’ils deviennent de bons médecins et avoir ainsi «l’impression d’avoir fait un peu la différence» dans leur réussite est l’une des grandes fiertés de la Dre Louise Champagne. Récipiendaire du prix Médecin de famille de l’année au Québec, elle fait visiblement aussi «la différence» auprès de ses patients et collègues. Ce prix remis par le Collège québécois des médecins de famille vient souligner «27 ans de souvenirs, 27 ans de travail qui m’ont fait grandir énormément», partage la femme de Longueuil. «Je ne suis pas du tout habituée aux prix. Ce n’est pas ce que je préfère; je préfère l’ombre, poursuit-elle. Mais ça fait du bien, c’est une belle reconnaissance.» Qu’est-ce qui fait d’un médecin de famille… un bon médecin de famille? Pour risquer une réponse, la Dre Champagne se réfère à une citation attribuée à Hippocrate – quoiqu’il y ait débat au sein de la communauté scientifique – qu’elle a prononcée au moment de recevoir son prix: un médecin guérit parfois, soulage souvent, écoute toujours. «Un médecin doit être très à l’écoute de ses patients, reprend-elle. C’est ce que je tente d’appliquer au quotidien avec mes patients.» Touche-à-tout Son parcours comme médecin a été précédé de quelques années de pratique comme infirmière à Sept-Îles. C’est à la suggestion d’un collègue médecin, qui avait constaté sa soif de connaître et de comprendre la physiologie, la pathologie, le pourquoi des gestes qu’elle posait, qu’elle est retournée sur les bancs d’école pour étudier la médecine familiale à l’Université Laval. Un détour qu’elle ne regrette aucunement, d’avis que ses huit années à évoluer dans le milieu de la santé comme infirmière auront facilité ses stages en médecine. «La relation avec le patient, je savais comment l’aborder. Je l’avais déjà apprise. Et ç’a teinté ce que je suis devenue.» De retour à Sept-Îles, elle aura, pendant 12 ans, touché à tout: hospitalisation, urgence, psychiatrie, hôpital de jour gériatrique, médecine de jour et enseignement aux résidents. «Nous avons beaucoup plus de latitude en région. C’était le besoin: il y avait pénurie de médecins de famille et peu de spécialistes à l’époque. Il fallait savoir toucher à tout. Alors j’avais orienté mes stages en sachant que je ferais des soins intensifs en retournant à Sept-Îles.» Deuxième partie Son déménagement sur la Rive-Sud en 2004 marque une scission dans son parcours professionnel, alors qu’elle s’est rapprochée d’une région universitaire. La Dre Champagne intègre l’Unité de médecine familiale de l’hôpital Charles-Lemoyne, qu’elle dirigera de 2009 à 2017. Elle devient également adjointe à la direction du programme de médecine de famille de l’Université de Sherbrooke (UdeS). L’enseignement fait alors partie prenante de son quotidien. Un volet de son parcours qu’elle apprécie grandement. «Transférer ses connaissances, être un bon modèle de rôle pour les résidents et les externes, ces derniers n'ayant pas encore choisi leur spécialité, c’est gratifiant. Si j’ai pu faire une différence dans leur choix, tant mieux. C’est un beau travail.» Pour convaincre les étudiants d’opter pour la médecine de famille – parfois jugée moins attrayante que les spécialités –, pas de recette magique. Il faut être soi-même et avoir du plaisir à faire son travail. Un plaisir que l’on espèrera contagieux. «En présentant la diversité de ce que la médecine familiale a à offrir: c’est tellement vaste.» Par ailleurs, la Dre Champagne contribue à améliorer la prestation de soins aux aînés dans les unités de médecine familiale de l’UdeS et à intégrer des unités de formation en CHSLD et en soins à domicile. Celle qui a fait beaucoup de soins palliatifs se dit aussi fière d’avoir réussi à accompagner les patients «jusqu’à la fin, en douceur. C’est une satisfaction.» Vocation De par son rôle, le médecin rencontre des patients dans des moments difficiles, de souffrance. Même après toutes ces années, impossible de rester complètement immunisé. «J’ai une boîte de kleenex doux dans mon bureau!, lance-t-elle. Quand j’annonce à quelqu’un qu’il est atteint du cancer, je sais que je fais en sorte que tout s’écroule pour lui. Quand je donne une mauvaise nouvelle ou que je partage un moment difficile, je peux verser des larmes, mais je dois me ressaisir.» Ce contact lui aura appris à savoir profiter de la vie, se disant choyée d’être en santé. Aux yeux de la Dre Champagne, la profession de médecin est bel et bien une vocation. «C’est un privilège d’être acceptée pour le cours de médecin. Quand on a ce privilège, c’est avec l’intention de donner de son temps, de sa personne. On ne choisit pas la médecine pour travailler une journée par semaine.» Une disponibilité qui nécessite une acceptation de la part de la famille. La Dre Champagne se dit chanceuse de pouvoir compter sur un amoureux qui comprend cet investissement. «On choisit les bons côtés – la relation avec les patients, les collègues, l’enseignement –, mais aussi ce qui est moins l’fun: la garde, avoir moins de temps pour soi. Alors dans ce sens, c’est une vocation.»