Culture

Véronic DiCaire, multiple et unique

le vendredi 25 janvier 2019
Modifié à 14 h 01 min le 25 janvier 2019
Par Ali Dostie

adostie@gravitemedia.com

SPECTACLE. Le public de Véronic DiCaire aime ses «classiques»: impossible de se départir de Ginette Reno, Céline Dion, Lara Fabian ou encore Édith Piaf. Et il n’était pas dans l’intention de la principale intéressée de s’en défaire non plus. Seulement, il y avait la volonté avec ce troisième spectacle d’aborder le tout autrement. Et c’est réussi. «On s’est forcé pour donner du nouveau. Comment on peut réinventer ça? Avec Josée Fortier à la mise en scène, on a travaillé fort, on n’a pas voulu aller dans la facilité, d’où certains flashs qu’on a trouvés», avance la chanteuse. Flashs qu’il serait ici inopportun de révéler. Gardons la surprise. Avec six danseurs qui l’accompagnent sur scène dans une scénographie flamboyante, Véronic DiCaire fait entendre des dizaines de voix, de Diana Krall à Marie Carmen, en passant par Dolores O’Riordan, des Cranberries, Cœur de Pirate, Nanette Workman, Safia Nolin et Pink. De toutes les approches qui révèlent un plaisir évident chez la chanteuse, le pari des segments plus humoristiques est particulièrement gagnant. Elle renoue aussi avec les comédies musicales, alors qu’elle a joué il y a quelques années dans Grease et Chicago. «Je suis très fière de ce show, je l’aime vraiment», admet l’imitatrice, à l’aube d’une tournée de trois ans qui la mènera en alternance en France et au Québec, en plus de quelques passages en Suisse et en Belgique. La recette En spectacle, Véronic DiCaire laisse poindre quelques indices du processus de création qui lui permet de reproduire – et incarner – toutes ces voix. Comme ces catégories dans lesquelles elle classe les différentes chanteuses auxquelles elle se mesure. Au moment de s’attaquer à une nouvelle voix, elle ira piger dans ces catégories. «Ce que j’explique sur les catégories, c’est un peu vrai, relate la Franco-Ontarienne, au terme d’une série de trois représentations à Brossard. Quand je fais une Charlotte Cardin, c’est comme un livre de recettes. Je vais aller chercher un soupçon de telle voix, un soupçon d’une autre, et je vais mélanger ça. Je pige, je travaille les textures, les intonations. Un moment donné, ok, j’ai trouvé la voix de Charlotte.» Et si l’essence de l’imitatrice repose fondamentalement sur la capacité de s’effacer pour laisser vivre les imitations, il n’en demeure pas moins qu’un soupçon de Véronic DiCaire subsiste. «Ma voix doit être présente, c’est la base de toutes les autres. Je ne la retiens pas, je ne la cache pas... mais je la tasse un peu. Je la fais chanter quand je fais du ménage; elle n’est pas opprimée!» La voix éraillée de Janis Joplin s’est récemment ajoutée à son répertoire. Le timbre si singulier de l’interprète de Piece of My Heart lui a donné du fil à retordre, mais l’artiste de 42 ans y tenait et a réussi à l’intégrer au spectacle. «Quand des voix deviennent trop compliquées, je les place à des endroits stratégiques, pour ne pas me fatiguer. Par exemple, dans le spectacle à Vegas, je n’étais pas capable d’imiter Liza Minnelli avant Aretha Franklin. L’écart était trop bas, je n’étais pas confortable.» «Et un moment donné, le corps s’habitue. La mémoire musculaire est là, ça devient plus facile.» L’expérience s’avère un autre facteur qui joue en la faveur de l’imitatrice. Elle prend conscience du chemin parcouru depuis ses premières imitations en 2008. Du travail, certes, mais qui s’intègre de plus en plus aisément. Comme un mécanisme. À cette époque où elle assurait la première partie de Céline Dion, elle ne comptait que cinq voix à son répertoire. «Et j’avais 30 minutes sur scène. Avec cinq voix, tu ne fais pas long!» De tout pour tous Véronic DiCaire n’hésite à piger dans plusieurs univers musicaux et époques pour proposer de nouvelles imitations. Aucune décennie ne semble laissée de côté. C’est pourquoi Nicole Martin peut côtoyer Jain, pas forcément dans le même segment. Il y a certes chez la chanteuse un souci de rejoindre et plaire au large spectre que forment ses spectateurs. «C’est assez complexe d’intégrer une nouvelle voix. Je fais attention. Je ne veux pas que les gens se demandent «Ah, c’est qui, elle?». Je ne peux pas chanter juste qui je veux. Comme Klô Pelgag, que l’on m’a conseillée. Elle est connue dans le milieu, mais de monsieur et madame Tout-le-Monde, je ne sais pas.» Klô demeure néanmoins dans sa «mire». Un jour, qui sait... Et faut-il aimer les chanteuses que l’on imite? «Oui, forcément, croit Véronic DiCaire. Parce que ce sont des voix tellement particulières. Je n’ai pas le choix de les aimer d’une certaine façon. Il y a un amour, un respect.» D’autres horizons Celle qui avait entamé sa carrière en présentant son propre matériel et sa propre voix ne s’ennuie pas de cette époque. La recherche de nouvelles voix lui procure encore autant de plaisir et pose toujours un défi stimulant. «Peut-être que plus tard, quand je serai trop vieille pour imiter Lady Gaga, je mettrai ça de côté! Quoique elle aussi, elle va vieillir! rigole-t-elle. Mais autre chose m’intéresse avant même de sortir un album...» Autre chose comme du théâtre ou toute autre expérience scénique. «C’est quelque chose qui pique ma curiosité dernièrement.» Voilà qui est lancé dans l’univers. [caption id="attachment_62371" align="alignnone" width="462"] Véronic DiCaire entourée des danseurs et musiciens[/caption]