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Voyage électrique jusqu’au Labrador : un Longueuillois trace la Route des Premières Nations

Il y a 11 heures
Modifié à 10 h 40 min le 07 août 2025
Par Sylvain Daignault - Initiative de journalisme local

sdaignault@gravitemedia.com

Le Longueuillois Rafal Zawadzki et sa complice Agatha.with.an.h ont réussi à traverser le Québec pour se rendre Happy Valley-Goose Bay, au Labrador, en voiture électrique. Il souhaite maintenant faire reconnaître les routes 138 et 389 comme «La Route des Premières Nations». (Photos : gracisuseté)

Parcourir 3500 kilomètres aller-retour entre Longueuil et Happy Valley-Goose Bay en voiture électrique, c’est le défi que s’est lancé Rafal Zawadzki cet été. Une aventure hors norme, aux confins du Québec et du Labrador, au cœur des territoires autochtones, menée sous le signe de l’écologie et de la réconciliation.

Très sensible aux enjeux environnementaux, le Longueuillois Rafal Zawadzki a repoussé les limites de la mobilité durable cet été. Du 25 juin au 14 juillet, il a traversé le Québec par les routes 138 et 389 jusqu’à Happy Valley-Goose Bay, au Labrador, puis est revenu à Longueuil. À ses côtés : la globe-trotteuse et créatrice de contenu montréalaise Agatha.with.an.h, une complice tout aussi engagée.

Pour donner un cadre à son projet, M. Zawadzki a fondé l’OBNL Écogestion Kueibecpol, dont la mission est de rendre les régions éloignées accessibles sans compromettre les principes de durabilité et de respect de l’environnement.

Bornes, paysages et autonomie

Premier constat encourageant : le trajet entre Longueuil et Baie-Comeau, qui a débuté le 25 juin, s’est fait sans accroc. «On trouve une borne de recharge à peu près tous les 350 kilomètres», précise M. Zawadzki. Si l’autonomie varie selon le relief, le vent ou la température, il a toujours évité par prudence de descendre sous les 15 à 20 % de charge.

Le barrage Daniel-Johnson (Manic 5). Il n’y a pas d’électrification au-delà. (Photo: gracieuseté)

Une fois passé le barrage Daniel-Johnson, l’électrification conventionnelle cède le pas aux stations solaires hors réseau, de grandes installations aussi rares que précieuses. Jusqu’au réservoir Manicouagan, ces postes – de la taille de quatre conteneurs – permettent une recharge en 45 minutes à une heure, le temps idéal pour s’imprégner du panorama nordique.

Sur la route 500, au Labrador, la recharge solaire reste présente, permettant de continuer le périple jusqu’à Happy Valley-Goose Bay. «Disons que bien des gens étaient curieux de voir une voiture électrique!» lance M. Zawadzki.
Cette aventure de 6 jours aller-retour a coûté la modique somme de 200$ en électricité.

À la pourvoirie Gabriel sur la route 389: la recharge du véhicule se fait grâce à des panneaux solaires car il n’y a pas de ligne de transmission d’Hydro-Québec sur environ 400 km de route. (Photo: gracieuseté)

À bord d’un bateau inuit

Pour la suite, le duo a embarqué sur un navire qui relie les villages inuits de la côte du Labrador. Pendant cinq jours et demi, ils ont vogué vers Nain, découvrant les réalités du transport maritime dans ces régions isolées. Puis, de Nain, escortés par un guide armé — précaution indispensable dans ce territoire d’ours polaires —, ils ont poursuivi leur route en bateau rapide (Speed Boat) de 23 pieds au travers les glaces jusqu’à Nachvak, dans le parc national des Monts-Torngat; un périple de six jours.

Après trois jours de route, le duo est rendu à Happy-Valley-Goose-Bay au Labrador. (Photo: gracieuseté)

«Le trajet prend normalement moins de temps mais nous avons été arrêtés par le brouillard», raconte M. Zawadzki en soulignant la difficulté de planifier sa journée dans ce climat. «Quand il y a du brouillard, on ne peut tout simplement pas naviguer. Un speed boat, ce n’est pas un brise-glace!»  

Le réservoir Manicouagan. (Photo: gracieuseté)

Sur place, ils ont exploré des vestiges archéologiques, dont un ancien village innu où les habitations étaient construites à l’aide d’os de baleine, faute de bois. «On a vu les vestiges d’anciennes communautés de 15 à 25 maisons. C’était émouvant», confie M. Zawadzki.

Une route à rebaptiser

Au-delà du défi technique, l’objectif du projet est profondément symbolique : faire reconnaître les routes 138 et 389 comme «La Route des Premières Nations».

«La 389 est la seule route provinciale qui dépasse le 51e parallèle», explique M. Zawadzki. «La désigner comme Route de la réconciliation serait un geste fort de respect envers les peuples autochtones qui habitent ces terres depuis des générations.»

Ce projet de route rebaptisée porte également un message d’inclusion. «Nous sommes deux immigrants : moi, arrivé il y a 24 ans, et Agatha, née ici de parents polonais. On voulait mettre en lumière les défis environnementaux et sociaux vécus par les communautés autochtones, en lien direct avec les changements climatiques.»

Un documentaire en préparation

De ce périple naîtra un documentaire diffusé en épisodes sur YouTube, à l’automne. Les deux aventuriers ont filmé plus de 2500 heures de contenu, incluant des échanges riches avec les communautés autochtones rencontrées en chemin.

Entre voyage, écologie, histoire et réconciliation, cette initiative ouvre la voie à une nouvelle façon de penser le tourisme durable — et surtout, le dialogue entre les peuples.