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Le dur métier de chauffeur d’autobus scolaire

le mardi 11 février 2020
Modifié à 16 h 52 min le 07 février 2020

À l’origine des retards et annulations des autobus scolaires se trouve la pénurie de main-d’œuvre, qui frappe durement les transporteurs. Selon l’un d’eux, les conditions de travail – plus ardues qu’auparavant – ne seraient pas étrangères au phénomène. À lire aussi: Transport scolaire: d'importants retards qui inquiètent Actuellement, Autobus Longueuil Rive-Sud et Baillargeon 2020 compte 160 chauffeurs pour effectuer les quelque 109 assignations (dont certaines comptent jusqu’à 5 circuits) pour la Commission scolaire Marie-Victorin (CSMV), en plus de celles pour la Commission scolaire des Patriotes. C’est trop peu. «Plusieurs chauffeurs sont des grands-parents, des retraités. Certains ont 70, 72 et même 77 ans. Après un an ou deux, ils lâchent, ils n’en peuvent plus», décrit le directeur André Southière. Sa compagnie compte aussi des «benchers», c’est-à-dire des régisseurs disponibles pour remplacer, si par exemple un chauffeur avise le matin même qu’il est malade. «J’en ai minimum cinq et ce n’est même pas assez. J’essaie d’en avoir 10, souligne-t-il. Cet été, j’ai embauché six jeunes. Ils ont tous démissionné.» Même les répartiteurs et garagistes ont leur permis classe 2, permettant de dépanner en cas de manque de chauffeurs. «Tout le monde met l’épaule à la roue», évoque M. Southière. «Manque de civisme» En filigrane de cette difficulté à recruter, M Soutière cible les nombreux irritants du métier, parmi lesquels se trouve un manque de plus en plus grand de respect… de la part des parents. M. Southière dit recevoir des plaintes de parents chaque semaine. Et sur le terrain, les chauffeurs subissent aussi des représailles. «C’est déjà arrivé que des parents mettent le pied dans la porte de l’autobus pour parler au chauffeur et choisir la place de leur enfant dans l’autobus», cite-t-il en exemple. D’autres se plaignent de retards, alors qu’ils ne consultent pas l’horaire fourni par la commission scolaire. Et sur la route, il note également un «manque de civisme incroyable». Il n’est pas rare que des parents venant déposer leur enfant à l’école stationnent leur voiture dans l’espace réservé aux autobus. Les chauffeurs doivent patienter à une intersection plus loin, ce qui contribue aux retards. «Il y a des pancartes, les policiers font des blitz, ça s’améliore quelques jours et ensuite, ça revient», déplore-t-il. Des chauffeurs sont souvent témoins d’automobilistes qui brûlent des arrêts à proximité des écoles. À cela s’ajoute le trafic, de plus en plus dense, et la gestion de 70 enfants dans un autobus. Changements de trajets Le nombre toujours croissant d’élèves qui intègrent la CSMV complique aussi la tâche du transporteur et des chauffeurs, qui doivent constamment modifier leur trajet. «Ça peut aller jusqu’à 21 changements de route par jour!» illustre André Southière. Des fois, on le dit que des routes ne se font pas. On avise la commission scolaire, il y a des échanges entre transporteurs.» M. Southière ne jette pas le blâme sur la commission scolaire. «Tout le monde veut donner un bon service.» Sous-financement Selon André Southière, le transport scolaire souffre de sous-financement, comparativement au transport urbain, en mesure d’offrir des conditions de travail plus attrayantes aux chauffeurs. «Il faut s’asseoir avec le gouvernement et discuter sérieusement. Il faut redresser la situation, clame-t-il. Avec les conventions collectives, les salaires de chauffeurs augmentent, mais les revenus sont gelés depuis six ans.» Le journal a tenté de discuter avec deux autres transporteurs scolaires. Ils n’ont pas retourné nos appels. (A.D.)