Le dernier outil marketing des cigarettiers
Au fil des décennies, le tabagisme a beaucoup diminué au Québec et les jeunes, les travailleurs et le public en général sont beaucoup mieux protégés contre la fumée secondaire. On pourrait donc penser que la lutte au tabagisme est terminée. Pourtant, 250 jeunes Québécois s’initient au tabagisme chaque semaine et l’âge moyen d’initiation est de 13 ans. La Journée mondiale sans tabac de l’Organisation mondiale de la santé a donc encore sa raison d’être; cette année, son thème est l’emballage neutre et standardisé des produits du tabac.
On pourrait croire que le marketing du tabac est chose du passé. On ne voit plus de publicité de cigarettes et leur étalage est caché dans les commerces. Toutefois, de nombreuses études et documents internes des multinationales du tabac démontrent que les paquets agissent eux-mêmes comme des mini-babillards publicitaires. Les paquets modernes ne ressemblent plus aux gros paquets d’il y a 20 ans : ils ont un design tape-à-l’œil qui vise à attirer certaines clientèles, dont les jeunes et les femmes. Plusieurs sont tellement petits que cela rend les mises en garde de santé quasi illisibles.
Pour mieux contrer ce marketing, certains pays se sont tournés vers l’emballage neutre et standardisé. Le principe est simple : un look unique et terne pour tous les paquets. Même couleur de fond, même grosseur de paquet, même grandeur de mise en garde, etc. L’Australie a adopté cette mesure en 2012 et a connu une baisse sans précédent de son taux de tabagisme. La France et le Royaume-Uni ont commencé à appliquer cette même politique il y a deux semaines, et plusieurs autres pays ont annoncé leur intention d’en faire autant.
Au Québec, une série de réformes à la Loi sur le tabac ont été adoptées l’an dernier à l’Assemblée nationale, dont une fixant une taille minimale pour les mises en garde (à partir du 26 novembre prochain). C’est un important pas dans la bonne direction, mais l’industrie pourra encore jouer avec la forme, les couleurs et le mode d’ouverture de ses emballages pour leur conférer une apparence plus attrayante.
Heureusement, le gouvernement de Justin Trudeau s’est engagé à instaurer l’emballage neutre. Il faudra redoubler d’efforts dans les prochains mois pour nous assurer que l’industrie du tabac ne réussisse pas à convaincre le gouvernement fédéral d’abandonner sa promesse.
L’enjeu en vaut la chandelle : le tabagisme tue encore une trentaine de Québécois chaque jour.
François Bélanger, agent de communication à la Coalition québécoise pour le contrôle du tabac