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Profiter du moment présent, sans oublier le futur

le mardi 24 juillet 2018
Modifié à 10 h 57 min le 24 novembre 2022
Par Jonathan Tremblay

jtremblay@gravitemedia.com

Pascal Lafontaine ne vit que pour sa passion du BMX

RÉSILIENCE. Deux ans à vivre. C’est ce que les spécialistes donnaient à Pascal Lafontaine en 2016. Aujourd’hui, à 25 ans et avec la moitié d’une jambe en moins, il a toujours espoir de trouver un remède à son cancer et de poursuivre sa passion du BMX à l’aide de sa prothèse.

Pascal Lafontaine décrochait ses premiers commanditaires à 19 ans. Une de ses vidéos a généré plus de 138 000 visionnements en ligne. Le jeune prodige n’avait pourtant commencé le BMX que trois ans plus tôt.

«J’en faisais chaque jour. C’était de la détermination, avoue l’ancien élève du collège Charles-Lemoyne. Après, je n’ai jamais arrêté, à l’exception de la période allant de mai 2015 à l’hiver dernier.»

Un persistant cancer est en effet venu remettre toute sa vie en question. Déterminé, il ne se laisse toutefois pas abattre. «Il ne faut pas que j’écoute les médecins. Sinon, je serais en train de me morfondre et de me dire qu’il ne m’en reste pas pour longtemps. Je me convaincs moi-même que ça va bien», dit-il, sûr de lui.

«Les spécialistes s’attendent à ce que j’aie des problèmes de respiration, mais je ne les ressens pas. Et je ne peux pas les blâmer, ils se fient aux résultats de mes tests!»

Malgré tout, pas une journée ne s’écoule sans que la maladie ne lui trotte dans la tête. Mais en forme comme il est, Pascal Lafontaine parvient à oublier ses problèmes lorsqu’il s’élance sur son vélo.

Un retour progressif

Le jeune homme a recommencé à pratiquer son sport de casse-cou cet hiver, après trois ans sans monter sur son vélo en raison de son amputation, survenue en 2015.

«Les médecins me conseillent de faire du sport, mais en même temps, de ne pas faire de BMX, admet Pascal Lafontaine. Lors des traitements de chimiothérapie, le système immunitaire est très faible et je pourrais faire une hémorragie interne. Mais bon, c’est le sport que je veux pratiquer et je ne compte pas vraiment arrêter.»

Avec sa prothèse en fibre de carbone, il pense conserver un calibre intéressant sur deux roues.

«Ça me pousse simplement à être plus créatif. Je fais des trucs que je n’aurais jamais pensé faire avant, car je dois m’adapter à la prothèse.»

Même s’il n’a pas régressé dans sa discipline, Pascal Lafontaine trouve aujourd’hui difficile de convaincre les commanditaires, qui «recherchent un niveau assez poussé». Ses anciens partenaires ne sont toujours pas au courant qu’il effectue un retour au BMX, à l’exception d’un, qui finance sa jambe artificielle.

Continuer de planifier et de croire

Le rider travaille présentement sur une vidéo promotionnelle qui sortira en 2019; sa façon de penser à long terme. «On veut être capable de vivre à court terme mais de planifier à long terme, affirme-t-il. C’est simple: le truc est de toujours garder des projets à longs termes et de réaliser qu’on est chanceux de vivre chaque petit moment.»

«J’étais quelqu’un qui ne croyait pas en ce qui ne se prouvait pas scientifiquement. Notre mental est plus fort que je croyais.» -Pascal Lafontaine

Voilà la philosophie du jeune diplômé de HEC Montréal, qui ne peut pas travailler en raison de l’aide financière qu’il reçoit du gouvernement. Croit-il qu’une partie du cancer se joue dans la tête? «Oui, beaucoup. Le cancer, en fait, c’est notre système immunitaire. Selon moi, il réagit selon la façon dont on pense et on agit. Si on se convainc nous-même qu’on est malade, on va avoir cette mentalité qu’il ne nous en reste pas long à vivre.»

Pascal Lafontaine n’en veut pas à la vie et ne crie pas à l’injustice. «Un sarcome, ce n’est pas un cancer relié à de mauvaises habitudes de vie. Malheureusement, on nait comme ça», conclut le jeune homme, réaliste.

Dure nouvelle à avaler

En mai 2015, Pascal Lafontaine est diagnostiqué d’un sarcome dans la jambe droite. «On ne croit pas que ça vient de se passer. Je me croyais vraiment invincible. En plus du BMX, je me considère en forme. Je ne croyais jamais que ça pouvait m’arriver. J’étais le premier surpris.»

Un mois plus tard, le 15 juin, il accepte de se faire amputer jusqu’au genou. «L’autre option était une opération, mais c’était voué à l’échec, affirme le natif de Boucherville. La reconstruction était trop grosse et j’aurais sûrement eu mal.» Pascal Lafontaine ne croit pas qu’il aurait pu refaire du BMX si ce n’avait été de l’amputation. «Ça peut parfois être un élément positif, de pouvoir continuer à faire nos activités de tous les jours.»

«Je pensais à court terme pendant un certain temps, mais je commence à réaliser que j’ai des chances de m’en sortir.» -Pascal Lafontaine

Durant les mois suivants, le cycliste extrême doit réapprendre à marcher. Pour ajouter à son calvaire, il ressent les mythiques douleurs fantômes. Après sa première chimiothérapie − «la plus dure» −, son cancer revient dans son genou, dans son tibia et en métastases aux poumons.

Six mois après son amputation et une semaine après la fin de ses premiers traitements, les médecins du Centre universitaire de santé McGill lui suggèrent une deuxième ablation, cette fois jusqu’à la hanche. La réponse est un «non» catégorique.

«Je refuse de mourir de ça et je refuse de me faire amputer en haut du genou. La réhabilitation devient beaucoup plus difficile dans ces conditions», explique Pascal Lafontaine.

À la demande de sa famille, son dossier a depuis été transféré à l’Hôpital Maisonneuve-Rosemont. «J’ai eu l’impression qu’ils voulaient plus collaborer avec les options qui restaient», admet-il. Depuis, son père et lui s’informent quotidiennement des nouveaux traitements qui sont offerts aux États-Unis et partagent leurs trouvailles avec le médecin qui le suit.

«Avec les heures qu’on passe à chercher ce qui se fait à travers le monde, on a souvent une longueur d’avance sur les médecins du Québec», confie-t-il.

Pascal Lafontaine ne peut par ailleurs s’empêcher de souligner l’appui inconditionnel de ses parents. «J’ai la chance d’avoir des parents qui m’aident. Je ne me serais pas vu passer par là avec des parents séparés, laisse-t-il entendre. Ma mère s’occupe du soutien moral alors que mon père se charge de la recherche médicale. Il y a des moments où c’est lui qui continue à m’y faire croire. Il me rappelle qu’il y a des options à Toronto, Philadelphie et Washington.»

La famille est justement en attente de nouvelles de Washington concernant un traitement qui aurait fait ses preuves. Pascal Lafontaine pourrait l’obtenir sous peu, une fois la documentation nécessaire remplie.