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Des relations de travail tendues à l'OMHL

le mardi 13 octobre 2020
Modifié à 11 h 43 min le 02 novembre 2021
Par Geneviève Michaud

gmichaud@gravitemedia.com

Selon les employés de l'Office municipal d'habitation de Longueuil (OMHL) rencontrés par Le Courrier du Sud, les problèmes ont commencé un mois seulement après l’arrivée en poste de la nouvelle directrice générale, en juillet 2019, avec le congédiement d’une employée de longue date.

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«Comment a-t-elle pu se faire une idée du travail effectué en un mois seulement?» se demande une employée.

D’autres congédiements ont suivi, dont celui d’une autre employée comptant de nombreuses années d’ancienneté.

«À l’automne 2019, la DG me parlait tous les jours du talent de cette employée, raconte un col blanc. Mais après les Fêtes, on ne la reconnaissait plus. On l’a souvent vu pleurer après des rencontres avec Mme Lavigne…»

L’employée a finalement été congédiée au printemps dernier.

Un ancien directeur a par ailleurs déposé une poursuite civile contre l’OMHL et sa directrice générale en août, après que l’Office ait mis fin à son emploi «sans cause juste et suffisante», un mois seulement après son embauche. Il réclame un peu plus de 82 000$, soit l’équivalent de 10 mois de salaire ainsi que 15 000$ en dommages punitifs et pour atteinte à sa réputation.

«Il est entré en poste et deux semaines plus tard, la COVID est arrivée, raconte un employé. Un mois plus tard, il a été congédié sous prétexte que le mandat était trop gros pour lui. Ils sont allés le chercher pour ce poste sur lequel il n’a jamais appliqué et ils ne lui ont même pas laissé le temps de démarrer quoi que ce soit avant de le congédier, en pleine pandémie!»

Outre les congédiements, certains employés, dont deux directeurs de longue date, auraient quitté de leur propre chef en raison d’un climat jugé «toxique».

Les employés soulignent également que plusieurs postes qui sont prévus au budget sont toujours vacants, et qu’ils ne voient pas l’heure où ils seront comblés, alors que plusieurs départements sont débordés.

Exaspérés, les employés ont fait parvenir deux lettres faisant part de leurs doléances à la direction générale et aux membres du C.A., le 15 juin et le 14 juillet.

«Le découragement, la démobilisation, l’épuisement psychologique et physique sont le lot quotidien de plusieurs d’entre nous», peut-on lire dans l’une de ces lettres.

Un premier syndicat en 50 ans

Face à ces nombreux problèmes, les employés cols blancs ont fait ce qu’ils n’avaient jamais fait en 50 ans : ils se sont syndiqués.

«On n’avait jamais eu besoin d’un syndicat, parce qu’on avait toujours eu de bons gestionnaires, explique une employée. Et on ne s’est pas syndiqués parce qu’on a peur du changement, précise-t-elle. On a eu de gros changements majeurs dans le passé, mais ça s’est toujours fait dans le respect et avec de la communication, ce qui n’est plus le cas aujourd’hui.»

«On n’a pas des communications opaques avec la direction générale; on n’a pas de communications du tout!» lance un employé.

Selon la directrice générale Danielle Lavigne, la demande d’accréditation syndicale aurait plutôt été faite par «un petit groupe».

«Le reste des employés n’étaient pas au courant; ça s’est passé à leur insu. La syndicalisation ne plaît pas à tous», affirme-t-elle, tout en soulignant ne pas être contre le droit fondamental des employés de se syndiquer.

L’une des premières actions posées par le nouveau syndicat a été de déposer une plainte pour le non-respect de l’horaire d’été des cols blancs. Un dossier qui est actuellement devant le Tribunal du travail.

«Travailler à l’Office, ce n’est pas une job; c’est une vocation.» – Un employé de l'OMHL

 

Ne pas s’éloigner de la mission

Les employés déplorent le fait que toutes les décisions et actions controversées de la direction générale amènent l’Office de plus en plus loin de sa mission première qui est d’aider les gens et les ménages dans le besoin.

«Depuis les fêtes que je demande de l’aide parce que mon département est débordé, poursuit l’employé. À un moment, la DG m’a dit de faire ce que je pouvais et que le reste attendrait. On ne travaille pas dans un entrepôt; on travaille avec des gens, et qui plus est, dans gens dans le besoin, s’indique-t-elle. Quand j’ai du monde dans la rue, je ne peux pas fermer le téléphone à midi le vendredi et ne les rappeler que le lundi…»

Les employés soulignent divers autres problèmes dans le service offert aux locataires, comme les plus de 1000 personnes retraitées qui ont dû se déplacer «en plein hiver» pour venir signer leur renouvellement de bail aux bureaux de l’Office, alors que les employés se déplacent habituellement aux logements pour réaliser cette tâche.

«On partait avec tout le matériel nécessaire et on allait vers eux, raconte un employé. Mais cette année, on a dû annuler et leur demander de se présenter à nos bureaux parce qu’on manquait de staff…»

Dans une lettre adressée au représentant du Syndicat canadien de la fonction publique, section locale 4887, en réponse à la lettre du 15 juin des employés, la DG assure que le bien-être des locataires est «toujours au cœur de la mission de l’Office».

«Non seulement il n’a pas été évacué et occulté de la réalité de l’Office, mais au contraire il a été amplifié», soutient-elle.

Des conflits de longue date

«Quand je suis arrivée à l’Office, j’ai reçu beaucoup de témoignages au fait qu’il y avait beaucoup de conflits entre les employés, affirme quant à elle la directrice générale Danielle Lavigne. Je sais qu’il y a de vieilles rancunes qui durent depuis 10, 15, 20 ans.»

Selon la DG, le fait que les employés travaillent dans différents bureaux rend la cohésion difficile. «Ce n’est pas bon pour encourager à travailler ensemble et avoir une belle collégialité.»

«Ma porte est toujours ouverte, poursuit-elle. Je le dis dans mes réunions d’équipe et à plusieurs reprises lors de mes rencontres avec les employés. J’ai souvent une file d’employés qui attend dans le corridor pour me parler.»

Or, une des doléances des employés est le fait que les portes de la direction générale sont désormais verrouillées et qu’ils doivent prendre rendez-vous pour rencontrer un responsable.

«Il faut comprendre que la direction générale a ses bureaux avec ceux des finances et de la comptabilité, explique Mme Lavigne, lorsque questionnée à ce sujet. Et notre personnel travaille dans un édifice à logements, avec des locataires juste à côté. Les portes sont donc toujours barrées par mesure de sécurité.»

 

Un conseil d’administration paralysé ?

«Ça brasse au C.A. autant qu’à la direction générale», affirme une employée de l’OMHL.

Selon les employés rencontrés par le journal, la plupart des membres du C.A. étaient jusqu’à tout récemment «dans le néant» concernant les problèmes vécus à l’Office.

«Une rencontre a été organisée en août entre les employés et les membres du C.A.», explique un employé. Une rencontre à laquelle la présidente Monique Bastien n’a pas assisté.

«Ils ont été abasourdis par ce qu’on leur a raconté; ils ne savaient rien…»

Alors que la directrice générale était absente pour quelques semaines, au courant du mois d’août, le C.A. aurait donné un mandat clair à l’intérim : afficher les 6 ou 7 postes à combler, approuver le temps supplémentaire des cols blancs – qui avait été interdit pour la première fois cette année – et rappeler d’anciens employés en renfort. Des ordres qui auraient été contremandés par une personne de la direction générale ou du C.A. par la suite.

«Pour nous, il y a un grave problème de relations de travail à l’OMHL, soutient le coordonnateur de la Fédération des locataires d’habitations à loyer modique du Québec (FLHLMQ) Robert Pilon. Normalement, le C.A. intervient dans ces cas-là, mais quand le C.A. ne peut pas agir, il faut que le ministère intervienne.»