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Des résidents dénoncent le vacarme toujours difficile à supporter

le mercredi 15 août 2018
Modifié à 14 h 33 min le 15 août 2018
Par Ali Dostie

adostie@gravitemedia.com

Bruit au parc Jean-Drapeau COMMUNAUTÉ. Les données recueillies par le sonomètre de la rue Merton à Saint-Lambert n’ont pas témoigné d’un vacarme excessif durant les trois jours des festivités d’Osheaga, avec des moyennes ne dépassant pas les 57 dBA pour des plages horaires de sept heures. Des données toutefois remises en question par des résidents qui n’en peuvent plus de subir le bruit des festivals qui se succèdent chaque fin de semaine. Selon le site Surveillance acoustique – Événements au parc Jean-Drapeau, toutes les moyennes captées par le sonomètre de Saint-Lambert pour les plages de 7h à 19h et de 19h à minuit font état d’un niveau sonore d’au moins 50,7 dBA, entre le 3 et le 5 août. Un sommet a été atteint à près de 60 dBA, un peu avant midi et en début d’après-midi le 4 août. Durant ces journées, des résidents de Saint-Lambert ont aussi enregistré le niveau sonore au moyen d’une application sur leur cellulaire. Plusieurs ont noté un décalage marqué entre leurs données et celles récoltées par le sonomètre installé sur la Rive-Sud. Ulrich Kanngiesser confirme que le niveau sonore a atteint un sommet de 77,2 dBA lors d’Heavy Montréal, la fin de semaine précédente. Son cellulaire a enregistré une moyenne de 69 dBA au cours d’une soirée. «Le niveau sonore correspond à une forte conversation. C’est comme s’il y avait toujours quelqu’un qui criait dans ta cour», image le citoyen. Christophe Malaterre, du regroupement citoyen Silence Saint-Lambert, est d’avis que ces écarts importants soulèvent un «problème de crédibilité» de la part de la Société du parc Jean-Drapeau. «Mais le plus gros problème est surtout que les basses fréquences ne sont pas adéquatement prises en compte, puisqu’il n’y a pas de mesure en dBC», insiste-t-il. Jusqu’à Longueuil M. Malaterre ne peut chiffrer avec exactitude le nombre de plaintes que les résidents de Saint-Lambert ont fait parvenir à la Société du parc Jean-Drapeau au cours des derniers jours. Il confirme toutefois que Silence Saint-Lambert en a reçu une cinquantaine, uniquement le dimanche 5 août, sans compter des dizaines acheminées les deux journées précédentes. Il note également un phénomène nouveau: un nombre croissant de plaintes par des résidents de Longueuil. C’est le cas de Marc-André Dickner. Il a emménagé l’an dernier sur la rue Labonté, dans le Vieux-Longueuil. Malgré un début d’été légèrement plus calme que l’an passé, Osheaga a selon lui dépassé les bornes. «C’était la totale. Même les vitres fermées, on entendait très bien», relate-t-il. Un vacarme qui lui rappelle celui du spectacle de Metallica en 2017. «La première fois qu’on a entendu ça, on se demandait d’où ça venait. Les voisins sont tous sortis. On pouvait discerner les paroles de chanson! Ça n’a pas de sens!» Récurrent et au-delà de 23h Résident de Saint-Lambert, Ulrich Kanngiesser assure qu’il n’a rien contre les concerts, conscient qu’il est bien pour Montréal d’avoir des événements qui attirent les foules. «Mais le problème, c’est que c’est chaque fin de semaine», constate-t-il. Lorsque les prestations se sont poursuivies jusqu’à 23h40 le 3 août – alors que la réglementation municipale de Montréal exige la fin des spectacles à 23h –, M. Kanngiesser n’a pu s’empêcher d’envoyer un courriel à la Société du parc Jean-Drapeau. «On m’a expliqué qu’un artiste était arrivé en retard, ce pourquoi ils ont prolongé le spectacle. Si un artiste a deux heures de retard, vont-ils prolonger jusqu’à 1h du matin? C’est ridicule!» Si le niveau sonore d’un festival musical à l’autre est relativement similaire, il remarque que le bruit émanant d’Heavy Montréal est particulièrement agressant. «C’est très agressif, ça énerve. Et peu importe le festival, honnêtement, c’est vraiment fort. On ressent la basse et les vibrations jusque dans notre lit. Mes enfants de 10 et 6 ans ont de la difficulté à s’endormir», expose-t-il. Incertitude inférieure à 1,5 dB La Ville de Montréal assure que les sonomètres installés à Saint-Lambert, sur le site des festivités et à Habitat 67 sont fiables. «Les sonomètres que nous utilisons ont une incertitude inférieure à 1,5 dB», indique la relationniste à la Ville de Montréal Gabrielle Fontaine-Giroux. Elle rappelle que les cellulaires ne sont pas conçus pour la mesure précise de son, qui repose entre autres sur certains facteurs tels que la qualité du microphone, sa capacité à capter la pression et la forme du boîtier. «Ces caractéristiques ne se retrouvent pas dans les téléphones cellulaires», soulève-t-elle. S’il semble incongru que le sonomètre de Saint-Lambert ait enregistré une moyenne plus élevée durant la journée du 7 août (62 dBA) plutôt qu’en plein cœur d’Osheaga, on souligne que des facteurs comme le bruit ambiant peuvent avoir un impact. «S’il y a eu des travaux pendant plusieurs heures dans ce secteur le mardi, ou encore si quelqu’un a passé la tondeuse, cela aura pour effet d’augmenter la moyenne», illustre la porte-parole. La Société du parc Jean-Drapeau ne peut divulguer le nombre de plaintes reçues durant Osheaga; un rapport complet sera dévoilé à la fin de l’été. Le maire de Saint-Lambert Pierre Brodeur était à l’extérieur et n’était pas disponible pour commenter. 55 dBA Un niveau moyen de 55 dBA dans une zone résidentielle (à l’extérieur) est considéré comme une nuisance sérieuse par l’Organisation mondiale de la santé. dB vs dBA et dBC Le niveau de bruit se mesure en decibels (dB). Les valeurs exprimées en dBA et dBC sont des variantes mesurant l’intensité sonore telle qu'elle sera perçue par l’oreille humaine. Les pondérations A et C servent fréquemment pour évaluer le volume sonore des bruits de l’environnement. La pondération A s’applique aux fréquences moyennes tandis la pondération C concerne les hautes et basses fréquences. Principales demandes de Silence Saint-Lambert • Réduction des émissions de contaminants sonores à hauteur maximale de 60 dBA, avec -5 dB supplémentaires pour les basses fréquences
  • Suspension immédiate des travaux de l’amphithéâtre géant jusqu’à obtention d’un certificat d’autorisation en matière de pollution sonore
  • Adoption d’un système de crédits bruits
  • Accord durable qui ait force de loi, assorti de pénalités financières, et mis en œuvre dès janvier 2019
(Source: Silence Saint-Lambert)   Les récents développements du dossier • En mars, les représentants de la Ville de Saint-Lambert, de la Ville de Montréal et de la Société du parc Jean-Drapeau se sont rencontrés et ont annoncé la formation d’un comité de travail.
  • Aucune limite de bruit n’a été imposée cet été aux festivals qui ont animé le parc Jean-Drapeau, étant donné les ententes déjà signées avec les artistes. En mai, la mairesse de Montréal Valérie Plante a affirmé que la situation pourrait changer dès l’an prochain et qu’une limite pourrait être fixée.
  • En juillet, trois sonomètres ont été installés: au parc Jean-Drapeau, près d’Habitat 67 et à Saint-Lambert.
  • Les mesures de son prises par les sonomètres sont rendues publiques depuis le 24 juillet. Les citoyens peuvent connaître les mesures en temps réel et différé, en consultant un site web.
  • Le litige entre Montréal et Saint-Lambert perdure depuis 2014 et fait l’objet de procédures judiciaires. Ces dernières ont été suspendues depuis le début de l’année.